Le livre des solutions

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Un méta-film fantasque, ingénieux et profond. Une réussite.

Huit ans après

Après Microbe et Gasoil en 2015 et dix épisodes de la série Kidding en 2018 pour lesquels il a fait à nouveau jouer Jim Carrey, voici enfin le grand retour au cinéma attendu pendant huit longues années de Michel Gondry avec Le Livre des Solutions. Et c’est un succès total et une totale jouissance tant du point de vue du scénario que de la mise en scène et de la direction des acteurs. Bien sûr c’est un film largement autobiographique et, du reste, il est dédié à sa tatie Suzette qu’il avait filmée en vrai dans L’Epine dans le coeur en 2010 et c’est aussi le film du retour aux sources, en l’occurrence les Cévennes, après des productions parisiennes et internationales. Le thème du film est très simple, comme une redécouverte de l’enfance, retour sur soi-même, sur les souvenirs et le plaisir du cinéma car, on le sait, Michel Gondry est un génie du bricolage et ce nouveau film fourmille d’idées et de dessins animés. C’est encore une fois un méta-film en quelque sorte, un sorte d’hommage au 8 et 1/2 de Fellini : Marc s’enfuit avec toute son équipe dans un petit village des Cévennes pour finir son film chez sa tante Denise. Sur place, sa créativité se manifeste par un million d’idées qui le plongent dans un drôle de chaos. Marc se lance alors dans l’écriture du Livre des Solutions, un guide de conseils pratiques qui pourrait bien être la solution à tous ses problèmes… 

 

Un guide illustré pour un film faussement foutraque

Ce guide pratique joliment illustré et bien écrit avec une graphie d’enfant laisse place à un film comique à la Tati parfois dans lequel Michel Gondry, un peu à la manière de ce qu’il avait fait pour La Science des rêves en 2006 et Soyez sympa, rembobinez en 2007, regorge d’idées loufoques et de bricolages de génie qui apportent au scénario une touche à la fois rocambolesque et quelque peu mélancolique. En effet, ce film artisanal sympathique et débridé fait place parfois à de la nostalgie, de la tendresse et beaucoup d’introversion comme si Michel Gondry retrouvait, au contact du souvenir de Suzette et de son retour au village cévenol, la magie de certains de ses meilleurs films. Quelques moments de bravoure aussi bien sûr avec un Pierre Niney impeccable, dans un rôle d’alter ego, dirigeant notamment un orchestre invité dans la salle à manger de Denise et l’apparition surprise de Sting comme interprète de la musique du film. Entouré de Françoise Lebrun dans le rôle magnifique de la tatie, de Blanche Gardin dans celui de la monteuse dépassée par les événements, ce nouveau film est un petit bijou magnifiquement photographié et monté respectivement par Laurent Brunet et Elise Fiévet qui apportera un peu de bonheur à une rentrée qui risque d’être particulièrement morose. Encore une fois, Gondry mise sur le délire et le cinéma home made et c’est tout ce qu’on aime de lui. On lui a demandé dans le dossier de presse si cette expérience n’avait pas été un peu difficile à vivre pour lui  : « Je pensais que cela serait traumatisant. Mais j’ai senti que toute l’équipe était derrière moi, les acteurs compris. Ils voulaient comprendre et m’aider à comprendre ce qu’il s’était passé dans ma tête il y a huit ans. Ce tournage est ainsi celui que j’ai préféré. Et j’ai adoré travailler avec ma monteuse, Élise Fiévet, qui est aussi douce que ferme. Et qui est surtout mon cerveau. »

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Durée : 102 mn


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