Fair Game

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Unique représentant du cinéma américain lors de la dernière sélection officielle du Festival de Cannes, « Fair Game » débarque ce mercredi avec ses gros sabots. Raté et peu recommandable.

Prenez une histoire vraie, ajoutez-y un réalisateur touche-à-tout et virtuose, incorporez deux acteurs impeccables, saupoudrez d’un potentiel dramatique dément et mélangez le tout. Délectez-vous alors d’un film au propos délicieux? Dans le cas de Fair Game, il faudra malheureusement se contenter d’un gloubiboulga peu digeste qui flirte de surcroit dangereusement avec la malhonnêteté intellectuelle.
Le récit se base sur l’histoire vraie de Valérie Plame, ancien agent de la CIA en charge de la non-prolifération atomique, dont l’identité est révélée lorsque son diplomate de mari réfute les arguments utilisés par la Maison Blanche pour appuyer l’invasion de l’Irak. Outre le scandale politique (dont le thème n’est qu’une énième resucée sur les origines douteuses de cette guerre), le film tente de s’intéresser au drame familial d’un couple qui ne partage pas la même vision de la citoyenneté: l’une la vivant à travers une allégeance sans trop de failles à son gouvernement, l’autre pratiquant la désobeissance civile dans tout ce que celle-ci suppose de patriotique.
L’histoire intime sur fond de "grande" Histoire fait souvent des miracles en matière de cinéma. Le film de Liman, en revanche, peine a nous intéresser à l’une ou l’autre, faute de partis pris ou de dialogues percutants. L’exactitude d’un décor, la précision d’une mise en scène n’ont jamais garanti la justesse, et ce n’est pas le réalisme d’un fond d’écran d’ordinateur ou d’une carte au mur dans les locaux de la CIA qui pourra sauver Fair Game de sa vacuité.
Pire encore, le film nous embobine dans une supposée dénonciation de la manipulation de l’opinion et du pouvoir des médias tout en infligeant la même chose a son public. L’emploi de documents d’archives pour étayer une oeuvre de fiction devient un ressort archi-vu ces derniers temps et Fair Game n’échappe pas a la règle, au point de se conclure sur les vraies images du discours de Valérie Plame au Congrès. La question que l’on se pose tout au long de ce film est "mais qu’est ce qu’il veut dire?" tant les intentions sont floues. L’opération de démolition de la réputation d’un agent de la CIA, dans le contexte explosif de la guerre en Irak, le drame d’une femme lâchée par sa hiérarchie, ses concitoyens, son mari, les magouilles politiques contenaient, on l’a dit, la matière d’un grand film. Mais c’est peut-être là que se situent les limites de la fiction, celle-ci en tout cas: trop bavarde, trop complaisante, trop partiale.
Bref, en dépit de son joli vernis, Fair Game est un exposé sans grand intérêt et corrompu par ses bonnes intentions. Pour un film qui traite de droiture et de trahison, c’est presqu’un comble.

Titre original : Fair Game

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Durée : 106 mn


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