Rencontre avec Chiara Mastroianni

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Avec Non ma fille tu n’iras pas danser, Christophe Honoré offre à Chiara Mastroianni un premier rôle tout en mouvement, en ruptures, en rebondissements. Explications, sous forme de mots-clé, avec << la >> belle discrète du cinéma français.

Un si doux visage. Traversé, bien sûr, par les reflets fantômes de ses deux parents, icônes du cinéma international. Mais encore par une forme de calme qui, pour le coup, lui est tout à fait personnelle. Mordant d’intelligence distanciée, de pudeur souriante, c’est ce calme-là, étonnant et vibrant, que Christophe Honoré a sans doute eu envie d’explorer à nouveau, pour mieux le mettre en mouvement dans son nouveau long métrage, Non ma fille tu n’iras pas danser. Chiara Mastroianni, jusqu’alors abonnée aux seconds rôles, ce depuis une petite quinzaine d’années (dont celui de la grande sœur raisonnable des Chansons d’amour) y est donc Léna, figure centrale pour une fois, et révoltée, d’une famille aussi « normale » que normative. Jamais son si doux visage n’a semblé aussi changeant : désarmé, animé, libre, vivant. Une belle énergie qu’elle prolonge en interview, rebondissant – elle la discrète – sur chaque mot-clé. Comme autant d’évidences intranquilles, d’équilibres instables. Écoutons la, calmement…

Personnage :

« Léna est un personnage politiquement incorrect. Elle est attachante mais énervante. Surtout, il n’y a pas de victimisation. Elle n’est pas dépressive, même si son mode de vie vient d’éclater. Mine de rien, elle est vaillante. Simplement, elle fait quelques erreurs… J’aime bien ce côté assez brutal de l’histoire. Car au fond ce film est violent : on réussit à la convaincre qu’elle ne peut pas élever ses enfants… ».

 

Mouvement :

« Dans Les chansons d’amour, j’étais une femme tronc ! C’était génial, cette fois, que le metteur en scène me donne cette possibilité de mouvement. Je ne
pense pas, pour autant, que Léna soit dans la confusion. C’est là que l’on comprend à quel point la mise en scène est terriblement importante. Car on voit bien sa détermination du début, même si ça n’est pas Terminator, non plus ! Et puis, le peu de confiance en elle qu’elle avait est réduit à néant par la pression familiale ».

 

Enfance :

« Un des grands thèmes du film, c’est l’enfant que l’on reste. Même si nos parents vieillissent et nous aussi. Je n’avais pas mesuré ça au moment du tournage. C’est seulement en le voyant. Il s’en dégage une certaine mélancolie. Une perception de la nature, aussi, qui ne m’est pas étrangère. D’autant plus qu’elle passe à travers le personnage du fils de Léna, cet enfant qui voit tout et comprend tout… ».

 

Christophe :

« C’était très étrange, quand on s’est rencontrés avec Christophe Honoré. C’était pour Les chansons d’amour, donc, et tout de suite quelque chose de facile s’est installé entre nous. On est tous les deux des gens très pudiques. On a du mal avec la parole et d’ailleurs, depuis, on n’a jamais parlé de nos vies privées, par exemple. Mais il y a cette proximité entre nous malgré tout, une forme de sensibilité commune. On se comprend très vite, très bien. Il m’inspire, il m’émeut, c’est un lien très fort, qui n’est pas conventionnel ».

Image :

« Mon image, ce n’est pas quelque chose dont j’ai conscience. Je vis assez normalement, je ne m’en rends pas compte. Ou alors à travers certaines questions des journalistes. Une chose est sûre, je ne vais pas voir que les films d’auteur ! J’adore aussi les films d’action et d’horreur… Ce n’est pas de ma faute si l’on ne m’en propose aucun. Un bon polar, par exemple, un film de genre, ça me plairait ! Mais tout cela tient énormément au désir, des autres notamment. La seule fois de ma vie où j’ai fait la démarche auprès d ‘un réalisateur, en tout cas, c’était pour Persépolis. Marjane Satrapi, de fait, a une personnalité très forte, qui a beaucoup d’influence sur moi. Son film, à sa façon, a eu quelque chose de désinhibant ».

« Fille de » :

« Il faut d’abord se faire une identité, c’est sûr. Mais le star system tel que l’ont vécu mes parents, c’est un cas d’école, pas représentatif de la vie des acteurs en général. Et j’ai été élevée très en marge de tout cela. On peut même dire que j’ai eu une éducation exceptionnellement normale par rapport aux circonstances.
Aujourd’hui encore, lorsque l’on est ensemble, on parle beaucoup de cinéma, ma mère est très cinéphile, très curieuse, et c’est effectivement quelque chose qu’elle
m’a transmise. Mais l’on ne parle pas de ce que l’on fait nous ! ».

 

Métier :

« Mon métier, ça reste du divertissement. Il faut savoir être humble par rapport à la place du cinéma, on n’est quand même pas en train d’inventer un vaccin ! C’est mon père qui, d’ailleurs, en guise de conseil, me disait d’être patiente. J’essaie, comme lui, d’être distanciée. C’est important de dédramatiser les choses. Au
fond, le cinéma, ça n’est pas forcément une chose dans laquelle on se perd ! ».

Propos recueillis par Ariane Allard

Titre original : Non ma fille, tu n'iras pas danser

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Genre :

Durée : 105 mn


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