The Long excuse

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Un écrivain blasé fait l´expérience du deuil dans un Japon mélancolique et découvre la vraie vie.

La perte et le deuil

Tiré de son propre roman, The Long excuse est un film magnifique sur la perte et le deuil. En pensant aux drames déclenchés dans certaines familles par le tsunami de 2011, Miwa Nishikawa, dont c’est le cinquième long métrage, a d’abord écrit un roman pour bien s’imprégner de ses personnages, puis elle est passée à la réalisation. Son film raconte d’ailleurs l’itinéraire d’un écrivain très connu, Sachio, interprété par le beau Masahiro Motoki aux airs de Sami Frey, qui perd sa femme brutalement dans un accident d’autocar. Sachio, à ce moment-là, est un homme blasé par son succès, qui ne s’implique pas vraiment dans ce qu’il écrit et qui trompe sa femme. Le film débute par une scène troublante : avant de partir en voyage avec sa meilleure amie, sa femme Natsuko, interprétée par Eri Fukatsu, lui coupe les cheveux. En quelques images, on en apprend beaucoup sur leur relation, sur le métier de Natsuko et sur la veulerie de Sachio. Mais, peu après, lorsqu’il apprend par un appel téléphonique que sa femme vient de mourir quand le bus est tombé dans un lac gelé, sa vie change complètement. S’il n’arrive visiblement pas à être triste, s’il semble complètement indifférent à ce qui lui arrive, il va être bouleversé par l’attitude de Yoichi, le mari de Yuki morte elle aussi dans l’accident. C’est en se rapprochant de ce père à la douleur inconsolable que Sachio va comprendre ce qu’est l’amour, ce que sont les enfants, ce qu’est la vie en fait. Cette rencontre va le faire basculer dans un autre monde, celui des vraies relations humaines, celui des difficultés que les gens rencontrent juste pour tenter de vivre, ou quelquefois seulement de survivre. Sachio, le blasé, le tombeur, l’artiste va comprendre à travers le maladroit Yoichi et ses jeunes enfants dignes, combien il est parfois difficile de continuer à vivre quand on a perdu un être cher. Cette situation le transformera et le rapprochera finalement de Natsuko.
 

Observer les relations humaines

Ce film de Miwa Nishikawa ne raconte pas à proprement parler une histoire, mais s’emploie à observer les relations humaines. Elle confie d’ailleurs au dossier de presse : « À chaque film, je m’aperçois que le sujet qui me passionne le plus est celui des relations entre les êtres humains. Elles sont compliquées, difficiles à comprendre et varient presque toujours en fonction de la situation. » Ce portrait d’un homme, pris dans une douleur faite de culpabilité et de terreur devant l’inéluctabilité de la mort, donne aussi une image de la vie au Japon, où le deuil ne se fait pas de la même manière qu’en Occident pour cette société pétrie de réserve et où la douleur bruyante de Yoichi peut paraître choquante, voire incompréhensible.

Acteurs excellents, atmosphère réaliste

Assemblage de scènes d’intérieur, de conversation ou de disputes, The Long excuse est remarquablement servi par un casting impeccable où les acteurs jouent à la fois sur l’improvisation et sur le texte de la réalisatrice. C’est d’ailleurs cet équilibre, surtout dans le jeu magnifique des enfants, qui fait la force de ce film, belle parabole sur l’amour et la mort. Dans l’interview accordée au dossier de presse, lorsqu’on lui demande ce qu’elle aimerait que les spectateurs retiennent en sortant de son film, elle déclare : « J’aimerais qu’ils sentent qu’ils ont quelque chose en commun avec le personnage de Sachio et qu’ils puissent s’identifier à lui. Et aussi que cela les fasse réfléchir à leurs propres relations avec leur femme ou mari, collègues ou qui que ce soit. Mais surtout, j’aimerais qu’après avoir vu The Long excuse, et au regard du parcours de Sachio, chacun s’interroge : Est-ce que je me comporte bien avec la personne qui partage ma vie, mes amis, mes enfants, mes collègues ? Est-ce que j’accorde suffisamment de temps à ceux qui m’entourent ? »

Titre original : Nagai iiwake

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Durée : 124 mn


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