Mon bel oranger

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D´un roman émouvant, Marco Bernstein signe un vieux film barbant.

Aux côtés de quelques autres, Mon bel oranger est souvent l’un des passages obligés de la littérature jeunesse au programme scolaire qui ne s’attire pas les foudres, ou plutôt l’ennui carabiné, de nos collégiens. Publié en 1968 et vendu à plusieurs dizaines de millions d’exemplaires de par le monde, il est presque étonnant que ce récit, en grande partie autobiographique, du brésilien José Mauro de Vasconcelos, n’ait jusqu’alors jamais été adapté à l’écran. Marcos Bernstein – dont c’est le second film après De l’autre côté de la rue en 2006, mais qui est plus connu pour le scénario de Central do Brasil de Walter Salles en 1998 – ne prend guère de risque et livre une version très proche du roman sans réelle ampleur ni – et c’est malheureux – portée.

Angélique à l’école, mais pas loin d’être insupportable à la maison, Zézé, 8 ans – de la page à l’écran, il a pris quelques années – est le passe-nerfs de son père, et d’à peu près tout le monde : il semble un peu payer pour la misère de la famille. D’abord auprès d’un arbre, puis d’un ami inattendu, il se dévoile et se libère peu à peu de ses souffrances. Manifestement Marcos Bernstein a lu le roman avec une boîte de mouchoirs à côté de lui et tient à le faire savoir. Alors oui, Mon bel oranger est phénoménalement triste, mais il n’est pas certain que l’apitoiement soit l’attitude à adopter. La musique fadasse et les gros plans sur les visages en larmes sont plus une fatalité que le reflet d’une émotion véritable. Finalement, en étant plus économe dans ses effets, le roman se montrait bien plus percutant.

Rares sont les réalisateurs qui parviennent à s’en tirer avec la mise en scène de l’imaginaire de l’enfance – et celui de Zézé est assez vif. On sent chez Bernstein un désir de stylisation pour rendre le regard de Zézé sur les adultes. Mais le mélange entre l’exagération de l’enfant et le recul que la caméra souhaite introduire prend mal. Le réalisateur n’est pas avare de tentatives, mais semble ne pas parvenir à dépasser les poncifs éculés d’une vision stéréotypée, voire publicitaire dans la joliesse du regard, et ce malgré la misère ambiante. Mais le plus surprenant, c’est cette impression d’assister à un film déjà vieux. Mon bel oranger n’est pas un film sans âge ou hors d’âge, mais un film déjà passé qui aurait très bien pu sortir il y a une bonne vingtaine d’années, parent pauvre de Cinéma Paradiso (Giuseppe Tornatore, 1988) ou des adaptations qu’Yves Robert fit de La Gloire de mon père ou du Château de ma mère en 1990, voire plus loin en arrière encore. Tout du traitement, au regard en passant par le grain même de l’image oriente ce sentiment qui ne peut trouver comme seule explication l’inscription temporelle du récit à la fin des années 1960. Cet effet de capsule temporelle assez troublant n’est définitivement pas à l’avantage de ce film assez vite oublié, à l’inverse du roman.
 

Titre original : Mon bel oranger

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Durée : 94 mn


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