C’est l’histoire d’un cadavre, celui d’Harry, découvert par un petit garçon. Qui donc a tué Harry ? Plusieurs personnes se sentent responsables de sa mort et tentent dissimuler le corps de peur qu’on les accuse du meurtre. Pur cynisme, les personnages du film n’ont cependant aucune considération pour cet homme dont on enterre et déterre le corps sans remords, comme s’il ne s’agissait que d’un simple objet encombrant ; François Truffaut dira à ce propos : « Tout l’humour du film procède d’un seul mécanisme, toujours le même ; une sorte de flegme exagéré : on parle du cadavre comme s’il s’agissait d’un paquet de cigarettes » (2).
La première demi-heure du film, narrée sur le ton d’un petit conte à l’humour macabre, est un peu lente. L’intrigue devient par la suite plus dérangeante et troublante, nous poussant un peu plus à la réflexion mais sans toutefois atteindre des sommets. Le sexe et la mort sont présentés comme des réalités toutes relatives dans une vision du monde à contre-courant du « puritanisme décadent » pour qui le sexe doit être proscrit et la mort considérée comme effrayante. En fait, de multiples interprétations plus ou moins tirées par les cheveux ont été émises. Certains critiques en France sont même allés jusqu’à dire que Mais qui a tué Harry ? constituait une parabole de la mort et de la résurrection du Christ. Mais le film, s’il ne peut pas être pris au premier degré, n’atteint pas forcément le niveau d’abstraction que d’aucuns lui ont donné.
Mais qui a tué Harry ? est donc un film particulier dans la filmographie de Sir Alfred Hitchcock. Esthétiquement très beau, il a en revanche été mal compris sur le fond : « [Ce film] répondait à mon désir de travailler dans le contraste, de lutter contre la tradition, contre les clichés. Dans The Trouble with Harry, je retire le mélodrame de la nuit noire pour l’amener à la lumière du jour. C’est comme si je montrais un assassinat au bord d’un ruisseau qui chante et que je répandais une goutte de sang dans son eau limpide. De ces contrastes surgit un contrepoint, et peut-être même une soudaine élévation des choses ordinaires de la vie » (3).
(1) Dossier de presse.
(2) François Truffaut, Helen Scott, Hitchcock, édition définitive, éditions Gallimard, collection Albums Beaux Livres, 2003, p.191.
(3) Ibid., p.190-191.