La mort remonte à hier soir (Duccio Tessari, 1970)
Devant l’incapacité des « petits officiers de police », un mois après la disparition de sa Fille Donatella, Amanzio Berzaghi s’adresse directement au commissaire Lamberti. Ce dernier, avec l’aide de son assistant, le brigadier Mascaranti, vont comprendre qu’un réseau de prostitution constitue la cause de ce drame. Réalisé par Duccio Tessari dont nous avons vanté précédemment, pour deux westerns – Un pistolet pour Ringo et Viva la révolution ! – sa grande maîtrise des spectacles musclés et enlevés, cette enquête dans le milieu confiné et caché d’une cité Milanaise peu reluisante constitue un véritable modèle du genre dramatico-policier. Cette recherche à l’issue forcement tragique pour le père, en guise de chant du cygne pour le duo de flics – excellents Gabriele Tinti et Franck Wolff -, possède la même humanité désabusée que Dernier Domicile connu (Jose Giovani , sorti la même année en France. Adapté d’un roman d’une des plumes les plus acérées du roman noir italien – quelque peu méconnu en France – Giorgio Scerbanenco, le métrage de Tessari explore, sans aucun manichéisme les affres de la prostitution. Mettant en relief sans jugement surplombant les implications politiques, l’avidité et la lâcheté des membres de la filière et de leur entourage, mais aussi le cinglant constat des travailleuses du sexe qui louent les vertus de leurs souteneurs, plus sécurisants pour leur commerce. Dans le rôle du père qui jette ses dernières forces pour retrouver sa fragile progéniture – un trouble mental l’a cloisonnée à l’état d’enfant -, Ralf Vallone se montre bouleversant de sincérité. Ce n’est pas la moindre qualité de cette véritable découverte proposée par Éléphant Films. Dans le même sillon, on ne peut que vous conseiller de (re)découvrir Mort suspecte d’une mineure (Pietro Germi, 1975, disponible sur Netflix).
Note : 4 étoiles.
La guerre des gangs (Umberto Lenzi, 1973)
Comme pour le titre précédent, il est de nouveau question de réseaux de prostitution, ainsi que d’un Milan au visage secret, bien différent de l’image glacée et proprette que nous avons habituellement de la capitale Lombarde. Mafieux Sicilien, Salvatore Cangemi (Antonio Sabàto), règne en maître sur la prostitution milanaise jusqu’au jour où un gangster français, Roger Daverty (Philippe Leroy), lui propose avec insistance de booster ses revenus avec un traffic de drogue. Rien d’original dans ce scénario qui voit s’affronter deux clans assoiffés de pouvoir, ni dans la surenchère de violence qui accompagne la chute du caïd. Cependant, on appréciera la neutralité, voire mieux le regard clinique dont fait preuve le film. Malgré son physique avantageux et son parcours semé d’embuches, le mafieux Sicilien ne fait pas figure de modèle, contrairement aux clichés du genre. Philippe Leroy qui nous a malheureusement quittés il y a quelques semaines campe un adversaire inquiétant mais jamais caricatural. Dépeignant ainsi une pègre exsangue qui ne croit plus en rien, même pas à un soi-disant code d’honneur qui pouvait donner l’illusion d’un certain panache. En toile de fond, un constat réaliste et/ou nihiliste sur une société italienne gangrenée de toutes parts durant ces années de plomb.
Note : 3 étoiles
Colère noire (Fernando Di Leo, 1975)
Deux enfants sont enlevés, le premier visé initialement est le fils d’un industriel, le deuxième capturé car il a voulu aider son copain n’est « que » le fils d’un modeste mécanicien. Au cœur de cette course contre la montre pour retrouver les ravisseurs s’exprime une révolte légitime contre le mépris de classe qui fait bouillir de rage la partie de la population Italienne privée du Miracle économique des années soixante-dix : « Si la merde valait de l’or, les pauvres seraient privés de cul », enrage le simple mécanicien. Dans le rôle du capitaine d’industrie on retrouve un James Mason vieillissant mais dont le mélange d’ambiguïté d’élégance reste intact. Dans la peau du père qui ne peut compter que sur lui-même pour sauver son fils un Luc Merenda au cuir et aux méthodes aussi dures que celles d’un Charles Bronson apporte la dimension spectaculaire – notamment dans les scènes de poursuite en moto. Mais la véritable vedette n’est autre que Vittorio Caprioli. Plus connu en France pour ses prestations dans L’aile ou la cuisse (Claude Zidi, 1976) et Le coup de parapluie (Gérard Oury, 1980), le plus souvent cantonné dans des seconds voire des troisièmes rôles, l’acteur au plus de 100 rôles démontre ici toute l’étendue de son talent. Tantôt bouffon et cynique – à l’instar de Jean Poiret, notre inspecteur Lavardin National – tantôt bouleversant dans un registre tragique, bouleversé par la douleur des victimes. Le « business » des enlèvements qui a fait flores durant les années soixante-dix est abordé avec vigueur et esprit vengeur dans cette Colère noire de très bonne facture.
Note : 3 étoiles