Interview de Louis-Julien Petit dans le cadre du Festival du Film de Demain

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La première édition du Film de Demain se déroulera à Vierzon du 2 au 5 juin. Le réalisateur Louis-Julien Petit, l’un des trois fondateurs, nous présente l’évènement.

Discount, Les invisibles et plus récemment La brigade, vos  films nous plongent au cœur des problématiques sociales et économiques actuelles.  Ils mettent en avant la question de l’engagement.  Peut-on dire que le lancement du  festival du Film de Demain est une étape supplémentaire dans votre engagement citoyen ?

Oui, en tout cas c’est dans la continuité. L’idée est de réunir des réalisateurs qui s’engagent au quotidien par leurs films dans la société. De faire un rassemblement populaire et engagé. Populaire dans le sens noble. Pour aborder des questions qui restent sans réponse dans la société : la place de la  femme, l’écologie, les discriminations, le racisme… Chaque film invité viendra avec une association, le but étant de tendre la main à la société civile. Pour moi, faire des films est un acte militant, comme dirait Corinne Masiero, la présidente de cette année : «  Je suis dans les manifs et dans les films. ». Moi, je crois à l’action citoyenne, les films peuvent avoir un impact sur notre société. Le film va susciter le débat. En montant ce festival, cela montre que nous sommes plusieurs à œuvrer dans ce sens. Et que l’on peut rassembler avec une dose d’humour. Ensemble avec Camille Carteret et Mathieu Bonnefond  nous avons souhaité agir en créant ce festival. Pour faire évoluer à notre petit niveau, comme un colibri, le regard sur notre société.

Vous avez choisi Vierzon comme terre d’accueil de ce festival. On peut supposer que ce choix n’a rien d’anodin, on pense notamment  à l’histoire de la ville, et également  à son contexte actuel ? 

La raison principale qui m’a fait opter pour cette ville est la beauté de son cinéma. Je suis du département du Cher, j’ai toujours été séduit par ce lieu. Le Ciné Lumière, sept salles gérées de mains de maître par la famille Fourneau. J’ai eu également le soutien de la ville, mais c’est d’abord en fonction des structures d’accueil  que j’ai fait mon choix. La salle, c’est là que le débat peut prendre vie. Je connais le contexte des lieux, j’ai également été séduit par le fait qu’il s’agisse d’une ancienne usine de tracteurs. Un lieu emblématique.

Quels sont les critères qui ont prévalu au moment de définir le programme de ces quatre journées ?

Déjà il fallait une compétition exigeante. Choisir des œuvres qui traitent de problématiques de société, mais avant  tout des bons films. La longévité d’un festival repose sur la qualité des  films proposés. J’ai mis la même exigence dans la programmation que celle que je mets dans mes films. Je garantis neuf très bons films. Ils m’ont tous ému en tant que spectateur. Je pense qu’ils plairont au public, qui pourra voter pour désigner son film préféré ( Prix du public). On voulait également avoir des films du soir plus porteurs, des comédies qui rassemblent. De fait, on est très heureux d’avoir les films  de Jérôme commandeur (Irréductible),  d’Olivier Baroux (Menteur) , ainsi que celui avec  Bernard Campan et Isabelle Carré (La dégustation)  ou encore Touchées,  le film réalisé par Alexandra Lamy. On veut  également créer des liens entre les films de télévision, les films de plateforme et les longs métrages. Car aujourd’hui on s’intéresse plus au sujet qu’au format  de diffusion.

Au-delà du fait  de vouloir convier le plus grand nombre de spectateurs à cette fête du cinéma, quelles sont les autres ambitions associées au projet ?

Je souhaite avant tout que les gens soient heureux, qu’ils  en parlent  autour d’eux. Et qu’ils reviennent l’an prochain pour découvrir une programmation aussi alléchante que celle de cette année. Grace à nos partenaires publics et privés on a pu mettre  en place une tarification très accessible,  des Pass pour profiter du Festival : 25 euros pour les quatre jours ou 10 euros par jour. Cela doit permettre de décloisonner les spectateurs. Il permet à madame ou monsieur qui préfère habituellement  des comédies de ne pas hésiter à  découvrir des œuvres qu’ils n’auraient pas vus autrement. C’est très important de créer des liens. Avec ce Pass vous pouvez également assister  aux Masters Class,  du jeudi au dimanche se succéderont : Laurent Perez del Mar, Coline Serreau,  Audrey Lamy, Anne Parillaud,  Julie Ferrier et moi-même.

Nous vivons une période où les inquiétudes qui rongent notre quotidien sont légion ; précarité, les différentes formes de violence, la préservation de l’environnement… Naturellement, le cinéma actuel est irrigué par ces sujets. Mais les films doivent apporter une part de rêve, de magie pour attirer les spectateurs dans les salles. Comment concilier ces deux dimensions ?

C’est ce que j’essaye de faire avec mes films. . La comédie peut être un moyen, mais pas seulement. C’est au réalisateur  de faire en sorte que cela fonctionne, et chacun le fait selon sa sensibilité. C’est possible de divertir le public tout en proposant des films engagés. Il y a de plus en plus de films qui arrivent à concilier les deux dimensions . Quand on voit qu’Au nom de la terre a réalisé deux millions d’entrées. Aujourd’hui, un grand nombre de personnes ne trouvent pas de réponses dans la société,  sur des sujets tabous par exemple;  le cinéma permet le débat.

En tant que réalisateur, producteur quel est votre cinéma de demain ?  Quels sont vos projets ?

Personnellement, je suis du genre à préférer les grosses surprises plutôt que les grandes attentes. Actuellement, je me consacre au festival. La brigade qui est sorti fin mars en France va bientôt commencer sa tournée internationale, j’accompagnerai prochainement sa présentation en Espagne. Quoi qu’il en soit mon prochain film va s’attaquer à un sujet d’actualité qui est resté sans réponse. Pour le mettre sur le devant sur la scène. Avec, j’espère un peu d’humour, car on a besoin d’humour.

Interview réalisé par téléphone le mardi 17 mai. Merci beaucoup à Louis-Julien Petit d’avoir répondu à nos questions,  ainsi qu’à Paola Gougne, l’attachée de presse qui a organisé cet entretien.

Programme complet sur le site du Festival https://filmdedemain.fr/

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Durée : Du 2 au 6 juin 2022 mn


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