Daisy Clover

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Un mélodrame poignant qui écorne sans concession la mythologie des studios hollywoodiens.

Los Angeles, les années trente, Daisy Clover (Natalie Wood), rêve de gloire. Sa jolie petite voix séduit un producteur hollywoodien qui n’a plus qu’à polir ce diamant brut de seize ans pour donner naissance à une nouvelle star. Boudée par le public et peu considérée par la critique lors de sa sortie en 1965, cette œuvre trop méconnue de Robert Mulligan mérite incontestablement bien plus d’égards. Sur un fil narratif dans la grande lignée des success-stories, une mise en scène à la sobriété exemplaire démythifie d’une façon glaçante et implacable l’usine à rêves hollywoodienne.

 

Une étoile filante

Daisy c’est Judy (Garland). La petite fiancée de l’Amérique trop rapidement tombée dans les affres de la dépression. Natalie Wood, autre enfant prodige au destin tourmenté s’impose comme une évidence pour ce rôle. Son énergie communicative et sa sensibilité à fleur de peau nous propulsent dans l’œil du cyclone hollywoodien. D’un simple claquement de doigts, Swan (Christopher Plummer), le magnat du studio éponyme transforme le petit canard mal dégrossi en une star adulée de tous. Les phases (apprentissage de la star) et les fastes de l’ascension que les comédies musicales savent mettre si spectaculairement en exergue sont réduits à minima. L’absence de repères temporels et, bien plus encore, l’art de l’ellipse narrative traduisent l’irrationalité d’une ascension si rapide.

Du succès public généré par son premier film, la nouvelle star restera hors-champ ; écoutant à la radio la grande soirée où tout Hollywood l’attend pour la célébrer et la récompenser. Dans l’immensité d’un plateau de tournage, dans le luxe sans âme de la villa pour stars, Daisy n’est qu’une enfant déboussolée et vide. L’exacte opposée de la jeune fille revêche mais pétillante qui vendait des photos de stars faussement dédicacées dans son petit kiosque du bord de mer.

 

Sans illusions

Par convention, les success-stories, même lorsqu’elles tournent finalement au drame, croient avec une sincère naïveté au bonheur final de leur personnage. Mulligan ne travaille pas dans le registre de l’illusion. On comprend mieux ainsi la déception du public de l’époque, peu rompu à ce type d’audace. Dès la première apparition de Swan, le ton est donné. Froid, direct, pragmatique, l’homme recherche seulement un nouveau produit à mettre sur le marché. Wade Lewis, qui deviendra le partenaire de Daisy, ne cherche pas non plus à dissimuler son cynisme sous ses belles apparences de star de ces dames. D’un mentor à un autre, d’un menteur à un autre, dans cet univers où même l’amour se fabrique et se monnaye le rêve est un voile vite balayé.

Si l’action se situe dans les années trente, Swan incarne bien davantage l’archétype du producteur post-âge d’or des studios. Fini les grands visions à la Zanuck, prêt à tous les risques pour l’amour du septième art. Place aux  businessmen qui ne jurent que par le marketing et les chiffres. D’une façon plus large, la déshumanisation qui règne sur les plateaux et dans les relations humaines soulignent le crépuscule des grands studios. Le geste de révolte final de l’héroïne annonce quant à lui l’une des grands  thèmes thématiques du nouvel Hollywood. Au début des années soixante-dix un vent de lucidité et de désillusion souffle sur la société américaine, plaçant l’individu seul face à un système corrompu.

Titre original : Inside Daisy Clover

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Durée : 128 mn


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