Alien, une saga mythique

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Retour sur une saga culte, du personnage de Ripley aux petits oeufs d’Aliens…

Alien, le huitième passager : La naissance d’un mythe

Réalisé entre fin 1978 et 1979 par Ridley Scott, le premier opus de la saga Alien, qui au départ ne devait pas être une trilogie mais le devint au nom de la sacro sainte rentabilité financière, se révèle être l’élément déclencheur du renouveau d’un genre jusque là cantonné à l’univers de la série B.

Hormis quelques exceptions notoires dans l’univers de la science-fiction : les recherches esthétiques et formelles à l’étude dans THX 1198 chez Lucas, qui le conduiront au premier grand et spectaculaire divertissement populaire de science-fiction qu’est le premier volet de la première trilogie Star Wars, ou encore l’incursion métaphysique de Kubrick au cœur de l’espace, ponctuée par les questionnements multiples qui se posent sur l’Evolution, la technologie, et l’existence au cœur de l’espèce humaine, peu de films tenteront de placer leur réalisation à la hauteur de la démesure qu’impose toute création d’un monde original et personnel.

Alien nous narre l’histoire des passagers du Nostromo, un vaisseau de transport intergalactique de retour sur Terre. Réveillé de leur hyper sommeil par un signal émis d’une zone inconnue et capté par l’ordinateur central, Mother, l’équipage, conformément au règlement, décide de se rendre sur place pour en déterminer la cause, et éventuellement porter assistance. Une fois atterri sur la constellation, Ash le capitaine décide avec deux autres membres de l’équipage du Nostromo de partir à la recherche de la source. En lieu et place de tout ce qu’ils pouvaient imaginer, c’est avec un des membres inconscients qu’il retourne au vaisseau ; rivé sur sa tête, un arachnide gélatineux munis de longs doigts squelettiques dont l’acide fait office de sang.

Ce n’est qu’à partir de là que le récit va pouvoir laisser place à l’horreur, abandonnant la découverte pour l’action. Cependant, à contrario du film de genre associé aux monstres et autres formes extraterrestres, où l’action est mise en place dès les premiers plans pour suggérer la présence du danger, le film ne se déclenche à proprement parler qu’à partir de la 53ème minute, soit pas loin de la moitié du film, imprimant cette volonté de sortir du carcan du sommairement « déjà vu – déjà fait ».

Cette dilatation temporelle du récit a pour vocation de nous faire pénétrer sur des territoires encore jamais foulés par l’homme, au plus près de la rencontre entre deux civilisations. Voici posé le constat entendu d’une humanité future à la dérive dans ce rafiot de l’espace, vieille centrale électrico nucléaire aux allures de cathédrale gothique, où le clinquant aseptisé des intérieurs spatiaux de 2001 contraste avec l’anarchie mécanique la plus totale. Le tout face aux vestiges cyclopéens d’un édifice organique presque charnel, tout droit sorti de l’esprit désenchanté de Giger et l’univers lovecraftien.

De là naîtra l’alien, mi-homme mi-monstre, bête d’un autre temps oscillant entre modernisme par son aspect métallique et ses protubérances quasi mécaniques, et archaïsme par sa forme organique.

Bien qu’asexué, l’alien ne faisant pas de distinction entre homme et femme, le film semble connoter, comme ont pu le remarquer de nombreux critiques, une très forte symbolique sexuelle, notamment par le jeu des décors dont les entrées font penser à d’énormes vagins et les couloirs à de longues parois utérines. L’alien, en déchirant le ventre de ses « hôtes », prend quant à lui la forme de phallus ; il est en outre muni d’une longue queue qui ne manque pas de remonter entre les jambes de l’officier Lambert vers la fin du film. Autant de signes qui ont pu faire penser à l’époque dans les milieux intellectuels et féministes à une forme de matérialisation de la condition de la femme : le protagoniste principal est d’ailleurs une femme, ce qui fera d’elle une star au caractère trempé, capable de rivaliser avec les hommes. Ceux-ci restent dans le film plutôt faibles.

En effet, la gente masculine semble souffrir du syndrome de l’anti héros désabusé qui marquera le cinéma des années 80. John Hurt ne croit désormais qu’en lui, son rôle de capitaine ne lui appartenant plus depuis longtemps car livré aux mains de la science. Il concède les décisions importantes, manque de pertinence dans ses jugements, et n’arrive même pas à obtenir les informations nécessaires concernant l’alien et la consigne 937 auprès de Mother, introduisant ainsi judicieusement le complexe d’Oedipe qui ne bloquera aucunement Sigourney dans sa quête de vérité.

Parker et Brett, les deux mécanos du vaisseau, constituent « le tandem », le vieux couple du ressort comique hollywoodien, l’un ne pouvant vivre sans l’autre, Parker toujours prêt à plaisanter et à rouler des mécaniques tout en fonçant dans le tas devant son meilleur spectateur en la personne de Harry Dean Stanton, qui ne cesse de répéter à la manière anglo-saxonne le gimmick « alright ».

Reste Ash, le scientifique qui se révèle être, vers la fin du film, une sorte de réplicant à la solde des commanditaires qui veulent récupérer l’alien aux mépris de toute autre considération, y compris les vies humaines de l’ensemble de l’équipage. C’est d’ailleurs ce même Ash qui, quelques instants après avoir disjoncté, nous confie l’une des bases de la réflexion « philosophique » qui sera mise en application dans Blade Runner : où se trouve donc l’être parfait? Au delà de toute morale, de toute notion de bien et de mal, Ash reconnaît face à l’espèce humaine en déclin sa propre infériorité, fasciné au point d’en être mélancolique par la pureté de l’alien et le constat de sa propre imperfection.

Cette réflexion contribue à faire de l’alien un être dépassant les vertiges de la conscience humaine, tenant plus des anciens mythes issus des tréfonds des mémoires et des terreurs souterraines. L’incarnation parfaite du mal, un joyau étincelant de férocité sans conscience ni remords. La force du film tient sur ce seul argument : faire ressurgir tel un cauchemar une forme occulte dépassant le temps et l’espace, l’organique et le mécanique, la science-fiction et l’horreur.

La complicité entre Jones, le chat de Kane, et l’alien n’est sans doute pas fortuite. Le chat, figure de la littérature fantastique chez Poe et tant d’autres, associé au mal et aux sorcières, au trait de caractère vif et indépendant, bien qu’effrayé comme tout animal par la supériorité physique de l’Alien, semble, dans un superbe gros plan sur son regard malicieux, se délecter de la vue de l’alien « dégustant » la cervelle de Brett (Harry Dean Stanton). Ce gros plan raccorde magnifiquement sur la séquence suivante avec un gros plan du regard terrifié de Parker, partagé entre la tristesse d’avoir perdu son binôme et la haine vis-à-vis du monstre qui a fait ça, un regard qui transpire la peur, le désarroi et la terreur que lui inspire l’alien. Ce raccord entre les deux regards fait de celui du chat le miroir psychologique et le reflet de la terreur qui s’empare du reste de l’équipage.

Plus tard dans le film, les deux êtres (chat – alien) seront d’ailleurs réunis au sein du même plan et, toujours par cet échange de regards complices, signeront un pacte autorisant l’alien à intégrer la navette de sauvetage par laquelle Sigourney compte s’échapper.

Ces petits ajouts jouant sur une conscience collective ne doivent pourtant pas nous faire oublier la portée du film et sa dimension spectrale hors du temps et des genres. Nous ne faisons qu’assister à un réveil dans un univers bien réel mais pourtant trop surréaliste pour être vrai, bercé par les brumes et l’obscurité, où les ténèbres règnent même au sein de la technologie. La caméra semble flotter, comme libre de toute contrainte évidente, durant la première partie du film, instaurant une sorte de communication entre l’extérieur et l’intérieur, le surréaliste et le réel. Fil subtil qui nous conduira jusqu’à la destruction finale de l’alien dans un plan irréel, mélange esthétique des différentes ambiances créées tout au long du film, froid et chaude, humide et brumeuse, éclairée mais sombre.

Fin du cauchemar, tout le monde peut se rendormir, la boucle est bouclée. Alien, le huitième passager, est à la fois un ovni cinématographique précurseur dans le domaine de la science-fiction, mais aussi et surtout cauchemar dantesque figurant des terreurs d’un autre temps.

 

Aliens, le retour : La destruction consumériste du mythe

Cependant, face à tout grand succès à la fois critique et commercial, le système hollywoodien ne peut rester indifférent, particulièrement lorsque le scénario peut être déclinable à souhait. L’alien ne restera donc pas endormi longtemps. En 1986 sort dans les salles la suite, ou plutôt devrait-on dire la séquelle (terme plus approprié en un sens) de la terrifiante créature, accompagnée de sa ribambelle de petits compagnons.

On retrouve à la direction le réalisateur du futuriste et crépusculaire Terminator, le dénommé James Cameron, artisan du cinéma spectacle made in USA et amateur de SF.

L’histoire reprend là où nous l’avions abandonnée : après avoir dérivé pendant 57 ans dans l’espace avec son chat, Ripley est recueillie sur terre. Désœuvrée, sans travail, et abandonnée de tous (sa famille notamment), elle est accueillie sur terre où les monstres rencontrés dans le premier opus reviennent jusque dans ces cauchemars pour la hanter.

S’en suit ce qui devait arriver : cette planète inconnue, où jadis Ripley fit sa première et fatale rencontre avec l’alien, est désormais investie par des colons terriens travaillant sur un nouveau site nucléaire. Stupeur et damnation, les contacts entre la terre et la planète sont coupés depuis plusieurs jours.

Intrigué et intéressé par les récits de Ripley, Carter Burke, homme d’affaires éloquent, décide de se rendre sur place en emmenant avec lui toute une armée de jeunes marins fraîchement moulus, suréquipés et surentraînés, un cyborg dénommé Bishop, et bien sur notre chère Ripley qui accepte, malgré ses réticences premières, de faire le voyage avec la petite compagnie.

La suite nous la connaissons tous. Elle est cousue de fil blanc. C’est l’hécatombe organisée dans les rangs des « boys scouts » qui ne se privent pas au passage d’exterminer une bonne dose d’aliens avec, pour beau cadeau final, le duel tant attendu entre les deux mères du film, Ripley qui défend la petite fille (retrouvée sur place, ayant survécu par on ne sait quel miracle au carnage antérieur), et bien sur la fameuse reine Alien, très énervée par la perte de ses premiers enfants et essayant de protéger tant bien que mal le reste de sa progéniture.

Un scénario simpliste à souhait et une mise en scène reposant sur un montage effréné, des personnages à la limite de la caricature qui ne sont que le reflet d’eux-mêmes, identifiables facilement à leur non-profondeur. C’est sûr que Cameron a de quoi tenir en haleine le public avide d’action et de sensations fortes.

En ce qui concerne le fond, il ne reste plus grand chose du premier opus. Fini le doute sur la réalité de l’univers qui nous est présenté, tout est mis à plat. Le cauchemar était bien réel. Le récit retombe dans la triste réalité du quotidien, banal matérialisme primaire. L’épouvante n’a plus sa place. Les questions de fond sont sacrifiées sur l’autel du divertissement horrifique et spectaculaire séparant avec distinction le bien du mal, rejetant les deux parties à leurs camps respectifs.

Le caractère de Ripley gagne certes en assurance et étoffe son côté de guerrière, mais sa figure représentative de femme libre prend un sacré coup en la rangeant derrière l’image de l’idéal du couple américain version masculine. En effet, elle est la garante et la protectrice du couple. Elle sauve sa fille adoptive des griffes des vilains monstres en s’autoproclamant mère par substitution et sauve son beau et blond lieutenant. On nous laisse entrevoir l’espoir et la possibilité que tout revienne dans l’ordre naturelle des choses, les valeurs morales l’emportant toujours sur le mal quelles que soient les difficultés des épreuves endurées.

L’un des seuls points positifs à mettre à l’actif du film semble revenir en grande partie à la direction de la photographie, piètres réminiscences et échos lointains de l’atmosphère brumeuse et glaciale du premier opus, basculant les personnages par des éclairages ingénieux dans un univers d’ombres où se cachent le souvenir d’une aura surnaturelle, le pouvoir d’un inconscient sombre et angoissant.

Le modernisme semble donc s’être emparé du mythe. La science-fiction reprend ses droits et opère médiocrement l’équilibrage entre récit d’anticipation et hypertrophie spectaculaire, rendant aux yeux de certains l’univers matériellement plus crédible, plus palpable, mais malheureusement désormais déconnecté de tout imaginaire, imprimant au récit un tournant quelque peu réactionnaire.

Heureusement, le troisième opus de Fincher va opérer un certain retour aux sources, avancer les pions d’une histoire vers une mystique qui les dépasse, rendant leur lutte plus désespérée et implacable, comme si dès le départ le destin était inscrit sur le marbre de leur tombe.

 

Alien III : L’apocalypse selon Fincher

Alien 3 n’est certainement pas porteur d’un héritage formel. Ruptures et cassures entravent la fluidité du récit : entre plans d’insert illustratifs et hypertrophie sonore pour plus de réalisme, utilisation à des fins purement stylistiques du ralenti et extrême fluidité de la poursuite finale, le film vogue sur un rythme bancal où plusieurs régimes de vitesse semblent s’affronter.

Là où Ridley Scott ou même Cameron (à sa manière) assuraient une certaine unité rythmique en deux blocs pour le premier ou en développement narratif classique pour le deuxième, l’ensemble du film de Fincher paraît déconcertant, l’éclatement référentiel et le bariolage visuel, héritage de son passage par le clip, ne facilitant pas la lecture directe. La faute de l’exercice de style confondant fond et forme, par l’éclatement de ses composantes et leur relatif fonctionnement en blocs autonomes, n’est jamais loin et se fait le reflet du combat qui a opposé, trois ans durant, Fincher aux tous puissants studios.

Pourtant, le fil qui sous tend l’ensemble architectural de l’édifice paraît, avec un peu de recul, résister au formalisme et au consumérisme hollywoodien car le récit de Fincher marque un retour aux origines. Derrière le miroir aux alouettes du grand spectacle, l’incarnation d’un irrémédiable fatalisme semble redessiner les traits de la figure mythique de l’alien, renouant avec l’image du mal absolu.

Dès les premières scènes, une fois passé le largage de la navette sous forme de flash back discontinu, et sa récupération sur la planète Fiorina, le ton est posé. Sous un soleil rouge flamboyant où se projette l’ombre du vaisseau annonçant la fin d’une ère (volonté analogique d’un autre temps en pleine césure avec les balbutiements de l’ère numérique en action à cette époque), s’en suit une remarquable plongée en abîme sur Ripley, allongée sur une table clinique, semi-inconsciente et agitée. Apparaissent des flashs violents et fulgurants des membres de l’équipage décédés, précédés par l’apparition plein écran du rapport de l’ordinateur de bord. Le contraste des images et le montage en parallèle vertigineux provoque un malaise évident : en rentrant dans ces murs, on sent la mort régner en maître.

Fiorina 161 incarne à la perfection le lieu du non retour. Reprenant à son compte la dramaturgie du huis-clos, il enferme le lieutenant Ripley dans un espace métaphysique aux aspects théologiques, une prison de feu et de fer aux allures de monastère gothique où les reclus de l’existence ont fait vœux d’abstinence, se sont rasés la tête, et se sont inventé un monde anonyme dicté par une religion.

La mise en place du huis-clos reprend droit et sens car elle enferme le spectateur dans un espace vertigineux à dimension intérieure. Le piège se referme autour de nous. Il s’approche des méandres et des recoins d’une conscience de soi détruite par la violence inéluctable d’un destin tracé d’avance. Elle conduit les hommes à trouver refuge vers des croyances supérieures, abandonnant ainsi tout espoir de retour à la vie, la vraie.

Le personnage de Golic est sur ce point très intéressant et mérite qu’on s’y attarde. Résigné à la folie ordinaire du quotidien carcéral, il refoule ses instincts compulsifs de violence au nom de l’intérêt commun. A priori gentil et fragile mentalement, mais potentiellement très dangereux, sa rencontre avec l’alien et son baptême par le sang de ses frères vont avoir un effet décisif sur lui. Rejet frontal à sa propre lutte intérieur, l’alien est à la fois le révélateur des instincts meurtriers et figure absolue du mal.

Rejoignant les réflexions du cyborg médecin du Huitième Passager de Ridley Scott sur la perfection de l’alien juste avant son immolation (Cf. Chapitre 1), Fincher détourne la quête de l’absolu scientifique (l’arme parfaite au-dessus de toute être vivant) pour l’amener sur le terrain de la folie, ou plutôt devrait-on dire de la schizophrénie(le dédoublement de la personnalité, une de ses manifestations, est un thème récurrent chez Fincher). Cette psychose délirante et chronique serait la réappropriation de soi par une déflagration d’énergie pure, l’acte gratuit par exemple ; une forme d’absolu refoulé refaisant surface par le biais de la figure du double, en l’occurrence l’alien.

Retour aux origines du mythe en ce que sa définition a de multiples, à la fois être surhumain et construction de l’esprit qui ne repose pas sur un fond de réalité, l’alien paraît tout droit sorti des enfers.

C’est à l’issue de deux séquences montées en parallèle que nous assistons, sous le prêche de Dillon, prophète et détenteur du statut oratoire de la communauté, à la naissance de l’alien des entrailles d’un bœuf (un chien dans la version courte), au cœur de l’abattoir, pendant la crémation dans le fourneau en fusion des membres de l’équipage décédés lors du crash de la navette sur la planète Fiorina. « La mort engendrera la vie », proclame le prophète au moment précis où l’alien explose la cage thoracique du bœuf et éjecte son fœtus sanguinolent sur le carrelage froid de l’abattoir. L’acte même de donner la vie n’a donc ici plus de sens, car de la mort naît l’incarnation de celle-ci. Eros – Thanatos, bien et mal sont tous les deux liés sans aucune distinction. La seule issue possible de l’homme est donc de mourir.

Ripley le sait très bien, surtout qu’elle porte en elle, sans le savoir au départ, l’embryon légataire de l’avenir et de la survie de la bête. Malgré son crâne rasé (signe de l’uniformisation), elle tente d’aspirer un moment à une vie normale (elle a pour la première fois dans la trilogie une relation charnelle avec un homme), et de prendre du repos même si ses décisions reposent toujours une certaine part d’instincts : décider vite, comme si le temps était compté. Le ton de Sigourney affiche un cynisme et une lassitude qu’on ne lui connaissait pas. Devenant son propre ennemi, sa seule issue est d’accepter de se sacrifier, ce qui ne se fera pas sans mal. Tout d’abord, elle demande à Dillon de la tuer. Celui-ci refusant tout en l’exhortant au combat, elle décide alors d’aller affronter seule l’alien. Leurrée par ses propres yeux, elle prend conscience alors de l’issue et accepte de prendre les armes, au sens figuré car la prison n’en possède pas, pour tuer la bête et se sacrifier elle-même.

Ce sacrifice, au regard du film et de son aboutissement, est à double sens et semble détenir l’une des clefs de lecture possible du film de Fincher. La personnalité de Ripley se fait l’écho de la résignation de Fincher face aux studios. Par le sacrifice de son héroïne, le réalisateur semble affirmer sa volonté d’échapper aux griffes de la Twentieth Century Fox et à ses velléités de pouvoir ; il signe son indépendance par le suicide à la fois du personnage mais aussi de la construction commerciale de l’alien. Comme pour signifier qu’il n’appartient à personne d’autres de pouvoir s’approprier le mythe car celui-ci doit rester libre dans l’inconscient du spectateur. La réutilisation comme épilogue du rapport enregistré par Ripley à la fin du premier opus de la série, avec un léger zoom sur la carcasse de la navette, résume tout l’esprit de ce troisième opus. A la fois hommage à une certaine naïveté du film de Ridley Scott tout en sachant pertinemment que la nostalgie n’a plus sa place dans la société actuelle, ce plan est un témoignage vibrant de la croyance en un cinéma garant de l’imaginaire collectif, témoignage d’autant plus profond que nous connaissons l’anarchisme et le scepticisme qui animent les réalisations de Fincher.

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