Week-ends

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Deux ans de la vie de deux couples, le temps des week-ends.

Il ne faudrait pas voir Week-ends pour ce qu’il peut d’abord sembler être, à savoir un petit précis de sociologie du couple, de l’émancipation et du temps qui passe. Il y a bien de cela, mais le troisième long métrage d’Anne Villacèque a une ambition plus humble, à chercher davantage du côté du scénario et de la mise en situation que de la leçon de vie. C’est l’histoire de deux couples amis, Christine et Jean d’un côté (Karin Viard et Jacques Gamblin), Sylvette et Ulrich de l’autre (Noémie Lvovsky et Ulrich Tukur), et d’une idée concrétisée il y a longtemps, celle d’acheter deux maisons face-à-face, au bord de la mer en Normandie, où l’on se retrouverait les week-ends et les vacances, loin des turpitudes et des obligations de la ville. De ce que ces quatre-là font de leurs semaines, on ne saura pas grand chose, à part que Jean est musicien et que Christine, sans ne rien spoiler, se mettra bientôt à une formation de chant grégorien. Ils se connaissent depuis près de trente ans, ont évolué côte à côte, ne sont peut-être plus aussi proches qu’ils l’ont été. Et quand Jean quitte Christine, l’équilibre se rompt définitivement, obligeant chacun à une remise à plat de son rôle et des relations bilatérales.

Co-écrit avec Sophie Fillières, le scénario de Week-ends ne s’encombre pas d’une réelle linéarité, s’amuse plutôt à placer ses personnages dans des situations non-événementielles : des dîners dans les jardins respectifs, des cafés de fin de repas et des conversations au coin du feu constituent l’essentiel de leur planning, agrémentés parfois de balades sur la plage ou de virées au supermarché. Il s’agit de les regarder semaine après semaine dans un décor immuable. S’ils évoluent, c’est moins par ce qui leur arrive que par le temps qui s’égrène, moments additionnés qui font bientôt une vie. C’est ces moments qu’observe Anne Villacèque, la manière dont une rupture redistribue les cartes, comment le comportement adopté dans tel ou tel cas s’apparente à un choix de camp. Car les deux couples fonctionnent en miroir, et que l’un se délite pose fatalement l’éventualité chez l’autre d’un événement similaire : si l’on se sépare, comment vivrait-on que nos amis invitent l’ex à dîner? Est-il acceptable de faire la conversation avec la nouvelle compagne d’un copain de longue date, dont la présence éclipse forcément celle de la femme évincée?

Ce ne sont rien d’autres que ces pistes qu’explore Week-ends, qui se garde bien de donner des réponses. Le film de Villacèque, contrairement à celui, homonyme, de Andrew Haigh qui singularisait une relation en la mettant à l’épreuve d’un instant éphémère très inscrit dans le temps, lance l’hypothèse que l’amour et l’amitié se tarissent avec les années, en gardant à l’esprit que, s’ils se sont amoindris, ils ont bel et bien existé. La mise en scène est sage, sans génie, bien accordée à l’idée de banalité du quotidien qu’elle déroule, et le film souffre régulièrement de sa monotonie assumée et de scènes trop écrites qui résonnent souvent comme les passages obligés d’une étude de moeurs. Il y a pourtant de belles choses, notamment dans la prescience des peines à venir, comme dans cette séquence, la meilleure, où Karin Viard s’épanche sur son malheur devant un couple d’invités de Sylvette et Ulrich (“Vous connaissez le résultat? Résultat, je divorce!”) Le film est surtout aidé par l’interprétation idéale de ses acteurs, parfaitement rompus à l’exercice et qui savent suggérer beaucoup en ne faisant presque rien – ce qui est aussi la modeste qualité de Week-ends, qui dit mine de rien l’amertume des amitiés et des amours qu’on ne sait pas laisser partir.

Titre original : Week-ends

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Durée : 90 mn


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