Cannes 2019, jours 7 et 8 : Tarantino au sommet, les Dardenne touchent le sensible, Bong Joon-ho potentielle Palme d’Or

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Voilà trois films dont nous aimerions vous parler dans ce carnet de bord Cannois, trois films d’un très grand niveau, qui animent la Compétition Officielle comme jamais.

Pour voir Once upon a time… in Hollywood, il aura fallu attendre 2h30 et avec mon badge bleu, en étant la dernière à entrer dans la salle. Coup de chance, sachant que c’est l’un de ses meilleurs films montrés à Cannes, plusieurs années après sa Palme d’Or pour Pulp Fiction. Ce film qui a littéralement électrisé la Croisette avec Brad Pitt, Leonardo di Caprio et Margot Robbie hier soir, ne doit pas faire de l’ombre aux deux autres films vus en parallèle, Le jeune Ahmed des Dardenne et Parasite du réalisateur Coréen Bong Joon-ho. Deux films solides, comme le talent de leurs réalisateurs. 

Tarantino sait faire le show : « Once upon a time… in Hollywood » où le condensé de ses goûts en tant que cinéphile

On le sait, Quentin Tarantino aime le cinéma. Il nous a habitué dans ses précédents Django Unchained, Inglourious Basterds et autres Reservoir Dogs à nous donner le meilleur de ce qui l’anime au quotidien, tout en rendant parfois un hommage sincère et drôle aux genres cinématographiques – western spaghetti, romances hollywoodiennes, etc. Avec ce nouveau long métrage, le réalisateur tant attendu au Festival de Cannes joue encore une fois la carte de l’humour et du trash – avec une scène finale époustouflante, que l’on ne révèlera pas comme il nous l’a demandé, mêlant réalité – certains personnages sont vrais comme Sharon Tate, épouse du réalisateur Roman Polanski, et fiction – on voit le duo Leonardo di Caprio et Brad Pitt comme une métaphore d’Hollywood à la fin des années 60, entre passion et désillusion. Alors que le film se présente comme un enchaînement de scènes où chaque personnage est confronté à ses propres angoisses et défis, on s’attache à chacun d’entre eux, avec une certaine forme d’attente jusqu’au finale de cette histoire très riche en référence au 7eArt.

C’est un vrai film de passionné où tout a sa place, chaque détail, chaque mise en scène et chaque action. Les hippies sont-ils le nouveau démon ? Faut-il encore croire à ses rêves, même lorsque l’on est une star mondiale ? Quel est l’avenir d’un cascadeur pauvre, qui vit dans l’ombre d’un homme et de son passé ? Même si une partie du film, après la première heure, laisse penser que Tarantino a monté très vite – il y a un léger moment plat où l’action se ralentit, c’est un très grand Tarantino, drôle, trash, surprenant et original. À voir sans hésiter, au cinéma le 14 août.

Bong Joon-ho excelle avec son « Parasite »

Une claque. Ce film, que l’on attendait aussi avec impatience malgré le fait que les stars de sa réalisation sont très peu connues en France, est d’une finesse et d’une intrigue époustouflante. Alors que Okja du même réalisateur avait divisé l’année dernière, cette année, on ne peut qu’être d’accord sur ce film extrêmement palpitant, qui évoque en parallèle et avec précision la pauvreté en Corée, la famille, la vengeance et l’honneur. N’oublions pas que le réalisateur des excellents Mother, Memories of Murder et Barking Dog a un véritable don pour faire de grands films où tout est parfait. Difficile de lui trouver un défaut, son scénario est béton avec cette histoire folle d’une famille où chaque membre est au chômage, et qui, progressivement va se faire embaucher par une autre famille très riche. Sa réalisation, d’une beauté spectaculaire – on notera les plans des enfants bercés de lumière dans une maison aseptisée qui sert de décor, est égale à sa mise en scène où chaque personnage a sa place. A la fois comédie, thriller et drame, Bong Joon-ho a véritablement toutes ses chances dans la Compétition. Il pourrait bien être notre Palme d’Or, tant son film est terriblement bien fait. Affaire à suivre, dans nos salles le 5 juin.

« Le jeune Ahmed » des Frères Dardenne : un personnage de l’effroi

Encore une fois, Jean-Pierre et Luc Dardenne s’attaquent à un sujet de société. Ici, un adolescent de 13 ans qui tombe dans un fanatisme religieux, en écoutant un Imam manipulateur à Bruxelles. Que faut-il faire alors que tous ses proches tentent de le raisonner sans succès ? La force de ce film, c’est d’aborder de manière frontale un sujet grave, en soignant l’approche de ce personnage et en portant un regard d’observateur, jamais dans le jugement. Avec finesse et s’appuyant sur un scénario particulièrement bien écrit, les frères Dardenne livrent un long-métrage percutant. Le film est court, 1h24, on aurait aimé en voir encore plus car chaque scène, chaque épreuve que rencontrent les personnages nous donnent envie de comprendre mieux ce qu’il se trame dans la tête de cet adolescent perdu. C’est un très bon film, en salle aujourd’hui 22 mai.

 

Retrouvez-nous demain pour vous parler du film de Xavier Dolan en Compétition et celui de Arnaud Desplechin, aussi dans la course à la Palme d’Or.

 

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"Once upon a time... in Hollywood" de Quentin Tarantino

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