
Tout pulvériser
Sorti deux ans après l’invasion américaine en Irak, Team America, police du monde présente une équipe de soldats, oeuvrant pour le compte d’une mystérieuse organisation, prête à sauver le monde des terroristes de l’axe du mal. Critique de la politique extérieure sous le règne de Bush junior, le film n’a pas dû être prophète en son pays : sûrs de leur bon droit, les américains y sont plus facilement responsables de dégâts (Team America pulvérisant avec une certaine jouissance les monuments emblématiques des pays qu’il traverse, Tour Eiffel, Sacré Cœur ou les pyramides d’Egypte et le Sphinx) que de bonnes actions. A une époque où taper sur l’Amérique était encore perçu comme une trahison à la patrie, la satire a dû en agacer plus d’un. Mais il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que le film à message intéresse peu les auteurs de South Park. Au mieux, ils s’en fichent royalement.
Stone et Parker ne sont pas Michael Moore, tourné en ridicule avec une bonne dose de férocité. Ni démocrates, ni républicains mais affiliés au parti indépendant, ils sont des outsiders du cinéma, aussi bien pour un studio que pour les indépendants. La cible de Team America, où un acteur de Broadway sauve le monde des griffes de Kim Jong-il, n’est pas tant la guerre que le cinéma lui-même. Et le cinéma d’action hollywoodien de prime abord. Stone et Parker ont conçu leur film comme un pot-pourri des pires travers des productions Bruckheimer. La caméra singe Michael Bay, virevolte et fait tout péter. Les marionnettes placent autant de punchlines débiles que dans toute la filmographie du réalisateur d’Armageddon.

Pas de prisonniers
Les véritables terroristes de Team America, ce sont ses réalisateurs, lancés dans une entreprise de déconstruction qui fait mouche à plusieurs reprises. Stone et Parker rasent tout et ne laissent aucun survivant : si l’industrie en prend pour son compte, les acteurs « de gauche » (Sean Penn, Tim Robbins et consorts) sont loin d’être épargnés. Réunis sous la guilde des acteurs F.A.G. (« pédé »), ils se retrouvent prêts à prendre les armes pour défendre une improbable conférence sur la paix du dictateur nord-coréen.
Les réalisateurs n’ont pas non plus renoncé à l’humour qui fit le succès de South Park. Si Kim Jong-il remplace Saddam Hussein, les blagues scabreuses (voire scatophiles) sont toujours légion. Et ce, bien que le passage du dessin animé à la marionnette leur ait fait un peu perdre de leur mordant.