Louise Wimmer

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Femme de ménage à temps partiel, en galère à temps complet, Louise Wimmer se bat pour reconquérir sa dignité. Un premier film maitrisé et sensible, une belle révélation.

A la veille de ses 50 ans, Louise Wimmer est une victime du système, une anonyme à la dérive. Après son divorce, elle se retrouve à la rue, avec sa voiture pour simple maison et la voix de Nina Simone comme unique carburant pour garder la tête haute. Un seul espoir l’anime : retrouver un toit pour repartir à zéro.

Devant un tel pitch, notre lecteur pourrait redouter le pire de ce que le cinéma social français a déjà produit : un pensum social sur la précarité ou un mélodrame pleurnichard et racôleur. Rien de tel ici. La force du film de Cyril Menneguin est précisement de ne pas prétendre tirer les larmes ou sonner l’alarme. C’est que son sujet n’est pas à proprement la précarité mais la vie quotidienne d’une "sans grade". Le titre du film annonce la couleur : Louise Wimmer est tout entier centré sur un personnage. Aussi, le cinéaste place-t-il sa caméra au plus près de sa comédienne, taillant la zone avec Louise, accompagnant ses pas, sans la juger et sans trop élargir le champ. La justesse du regard est telle que le film rend ainsi attachant un personnage a priori peu sympathique.

Car, là n’est pas la moindre qualité du film, le cinéaste ne nous propose pas une jolie petite victime à plaindre. Il nous livre le portrait d’une femme entière, parfois désagréable, une battante au caractère bien trempé. Louise n’est ni un ange, ni une femme fragile, encore moins une figure exemplaire. Elle syphonne des réservoirs de voiture, grignotte les restes de plateaux repas, elle offre son corps à des inconnus, boit trop de bière et claque le beignet aux hommes bien intentionnés qui s’approchent un peu trop d’elle. 

Si le film de Cyril Menneguin n’a rien d’un documentaire, la précision du scénario, son souci du détail et son sens de la nuance dans la conduite du récit rappellent le passé de documentariste du cinéaste. On pense également aux frères Dardenne devenus l’étendard et l’étalon multi-palmé du cinéma réaliste et social des années 2000. Le rapprochement est d’autant plus tentant ici que Louise Wimmer nous rappelle un rien la jeune Rosetta, l’héroïne du film éponyme des Dardenne. Pour  incarner Louise, Cyril Menneguin a choisi Corinne Maserio, actrice peu connue qui tient pour la première fois un grand rôle à l’écran. Le cinéaste qui, avant Jacques Audiard, avait découvert le potentiel de Tahar Rahim à l’écran, prouve une nouvelle fois son incroyable flair : l’interprétation à fleur de peau de Corinne Masiero est tout à fait remarquable, l’actrice nous rendant subitement inoubliables le visage et la destinée d’une anonyme.

Présenté à l’automne à la Mostra de Venise, Louise Wimmer a ému le public. Il y a fort à parier que le film touchera au coeur les spectateurs qui prendront le risque de découvrir cet émouvant récit d’une reconquête. Un film sobre et tenu, une oeuvre qui se mérite mais dont ne peut que louer les qualités de jeu et de mise-en-scène.
 

Titre original : Louise Wimmer

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Durée : 80 mn


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