Le Mystère d’Oberwald

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Une expérimentation baroque contournable.

En 1980, Antonioni, cinéaste maudit en perpétuel exil, fait escale en Italie pour un projet télévisuel. Il adapte l’aigle à deux têtes de Jean Cocteau. Le support vidéo est en vogue et, en inlassable inventeur de formes qu’il est, le réalisateur relève le défi d’adapter la fantaisie gothique. Le résultat est mitigé. Le support vidéo VHS est limité de par son obsolescence programmée et sera rapidement évincé par la technologie numérique. C’est néanmoins l’occasion pour le cinéaste de Ferrare d’avoir recours aux effets d’optique en incrustation et aux filtres de couleur censés recréer les états émotionnels des protagonistes. 17 ans après les expérimentations sur celluloïd de la couleur dans le Le désert rouge, Antonioni renoue avec le genre dans un téléfilm à costumes.

 

Une lecture sirupeuse de “l’Aigle à deux têtes” qui sombre dans une théâtralité outrée..

Dans un nid d’aigle délabré, la Reine (Monica Vitti) vit recluse. Un jeune poète radical et à l’âme révolutionnaire du nom de Sébastien (Franco Branciaroli) ourdit un complot contre elle dans l’intention manifeste de la tuer et ainsi libérer le pays de la tyrannie qu’elle est censée exercer. Il faillit cependant à sa mission tandis que le destin frappe à la porte en même temps que son dessein. En place de le tuer en représailles tandis que sa tentative a avorté, la Reine est attirée par sa ressemblance avec son défunt mari mort sept ans plus tôt. Elle propose un pacte à son agresseur qui a recouvré ses esprits entre-temps..

Si certains thèmes antonioniens émergent : l‘artiste en tant que révolutionnaire et son habileté à susciter la réforme, le récit est indigent, poussiéreux et boiteux qui tire en longueur. L’hyperbole n’est pas une figure de style à proprement antonionienne qui le disqualifie d’emblée. La verbosité des monologues intérieurs en décourage quelque peu une lecture sirupeuse qui sombre dans une théâtralité outrée. Monstre sacré, Monica Vitti semble engluée dans un texte redondant bien qu’elle soit indirectement à l’initiative du projet.

Restent les paysages rehaussés de couleurs, le clair-obscur spectral des intérieurs et les incrustations fantomatiques qui confèrent à l’ensemble une tonalité surréaliste qui ne parvient pas à rivaliser avec l’original.

Titre original : Il mistero di Oberwald

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