Justice League

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Un ratage pathétique dont le DC Universe aura du mal à se remettre

Marvel et sa formule audacieuse d’univers partagé est devenu ces dernières années le mètre-étalon du blockbuster à succès, envié par tous les studios. Relecture moderne du serial d’antan jouant sur le regain feuilletonesque actuel dû aux série télé, l’univers Marvel aura su imposer un tout cohérent, un divertissement plaisant et sans génie mais qui, en dépit de quelques sorties de route (les piteux Iron Man 2 – Jon Favreau, 2010 – ou le premier Thor – Kenneth Branagh, 2011) aura su imposer un rendez-vous régulier et des personnages récurrents que le spectateur se plait à retrouver. La formule conçue patiemment s’avère cependant difficilement déclinable comme va le constater Universal avec son univers partagé Universal Monsters (tué dans l’œuf par le bide du très mauvais La Momie avec Tom Cruise – Alex  Kurtzman, 2017) et donc Warner cherchant aussi à la reproduire avec les super-héros DC comics. Tout avait pourtant bien commencé avec l’excellent Man of Steel de Zack Snyder (2013), refonte ambitieuse, sombre et spectaculaire de Superman qui offrait une vraie alternative au genre. Seulement, l’accueil mitigé et le triomphe d’Avengers (Joss Whedon, 2012) réoriente la politique de Warner quant au ton de son univers. Cela donnera le schizophrène Batman vs Superman (2016) où l’imagerie et les thématiques de Snyder sont constamment parasitées par les concessions mercantiles (le teasing des futures aventures et nouveaux personnages incrustés au forceps en plein film quand Marvel avait la sagesse de les mettre en post-générique). Après un Suicide Squad (David Ayer, 2016) catastrophique, Wonder Woman (Patty Jenkins, 2017), pourtant moyen, paraissait nettement plus regardable grâce au cadre rétro et au charisme de Gal Gadot – et une supposée portée féministe alors qu’un Kill Bill (Quentin Tarantino, 2003 et 2004) ou un Alien (Ridley Scott, 1979) portaient bien plus cet étendard qualitativement. La production chaotique de Justice League aura gâché la seule qualité de ce DC Universe, la patte de Zack Snyder. Epuisé par la pression du studio et découragé par le mauvais accueil critique, le réalisateur fait également face à un drame avec le suicide de sa fille. Il quitte donc le projet après la fin du tournage, laissant la post-production aux mains du studio qui entame de nombreux reshoots exécutés par Joss Whedon.
 

Le résultat, désormais sans aucune ligne directrice dans le ton, l’esthétique et la construction, s’avère donc catastrophique. Le montage chaotique enchaîne les séquences sans fluidités ni cohérence, l’atmosphère solennelle des précédents opus est oubliée pour un festival de blagues façon Marvel et les faux-raccords hérités des reshoots pleuvent (Ben Affleck affuté ou bouffi d’une scène l’autre, la moustache effacée numérique d’Henry Cavill – qu’il gardait dans le cadre du tournage de Mission Impossible 6 – bien voyante). Le seul espoir reposait sur la mise en scène de Snyder mais, hormis quelques fulgurances et plans iconiques, le montage orchestré par le studio gâche toutes les amorces formelles intéressantes. Le découpage rend le moindre combat incompréhensible et le climax plus spectaculaire constitue une bouillie numérique difficilement soutenable – surtout quand on se souvient de celle fabuleuse de Man of Steel. On sauvera une alchimie de groupe qui fonctionne tout de même assez bien, mais les dialogues ridicules, le méchant risible et une redite navrante dans les péripéties (encore des coffrets McGuffin récupérer et un rayon qui va détruire la terre, un climax archi revu dans les blockbusters récents) gâchera totalement cette dynamique. A force de vouloir livrer un objet calibré et sans orientation définie, Warner propose là un produit pas fini à tout point de vue et un des blockbusters les plus ratés de l’année.

Titre original : Justice League

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Durée : 120 mn


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