Hipotesis

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Un thriller paresseux qui peine à capter l’attention.

Roberto Bermudez (Ricardo Darin), spécialiste du droit pénal, anime comme chaque année un séminaire de droit à la faculté de Buenos Aires. Buveur mondain, homme à femmes voire professeur à étudiantes, Bermudez est un séducteur habitué à susciter l’admiration et la fascination. A un étudiant qui lui demande pour quelles raisons il est intéressant d’assister à ce séminaire réputé exigeant, il n’hésite pas à répondre « pour profiter de moi ». Un conseil que Gonzalo Cordera (Alberto Ammann), l’un d’entre eux, va prendre au pied de la lettre. Suite à la découverte d’un cadavre sur le campus démarre entre eux un jeu du chat et de la souris. Un jeu qui va tourner à l’obsession pour le professeur, vite persuadé que cet étudiant bien sous tous rapports est en réalité le meurtrier.

Adapté du livre Thèse sur un homicide de Diego Paszowski, Hipotesis est le second film d’Hernan Goldfrid, encore inconnu en France où sa comédie romantique Musica en Espera (2009) reste inédite. Ce n’est d’ailleurs pas le nom du réalisateur qui est mis en avant dans le dossier de presse mais celui de Ricardo Darin, la nouvelle star du cinéma argentin. En effet, thriller + Darin = succès comme l’avaient prouvé Les Neuf Reines (2002) et Dans ses yeux (2010). Le calcul s’est révélé concluant, en tout cas en Argentine, où le film est resté  en tête du box-office pendant 3 semaines.

 

 
A la question posée par le mathématicien Arthur Seldom dans Crimes à Oxford (Alex de la Iglesia, 2008), «peut-on connaître la vérité ?», Hipotesis répond «mais évidemment, et tout de suite en plus». Bermudez enseigne à ses étudiants que la résolution d’une enquête se trouvent dans les détails. Pour connaître cette vérité, il faut donc se montrer très attentif, c’est-à-dire savoir quoi regarder et où regarder. Et avec quoi regarde-t-on ? Avec les yeux, bien sûr ! Eurêka, le réalisateur tient là sa première idée de mise en scène, à peu de choses près la seule (hormis la scène réussie de danse aérienne), qu’il va décliner sous toutes ses formes. D’abord faire des gros plans sur les yeux du héros, qui voit des détails comme Haley Joel Osment voyait des morts dans Sixième Sens (M. Night Shyamalan, 2000) ; des détails baignant dans une lumière jaune verte digne des Experts Miami. Ensuite, le filmer dans un magasin de lunettes. Et pour finir, lui faire visiter une exposition consacrée à Picasso.

La réponse se trouve dans les détails. Postulat intéressant au cinéma, que le réalisateur aurait dû mettre en pratique : s’amuser avec ce qu’il nous montre, ce que l’on voit ou que l’on croit avoir vu. Mais là où Alex de la Iglesia se jouait de ses personnages et du spectateur, marionnette consentante d’un théâtre d’illusions fait de fausses pistes et d’énigmes, Goldfrid impose la réponse à l’énigme dès le début du film, une fois pour toutes, sans la remettre une seule fois en question. Nous espérons avoir à nous méfier des apparences, à être surpris mais ce que nous voyons est tout ce qu’il y a à voir. Une manière efficace de tuer l’esquisse d’intérêt qui se dessinait au moment de l’annonce du meurtre.
Le peu d’intérêt ressenti face au film tient aussi à ses personnages. Bermudez et Cordera se manipulent, se jaugent, se provoquent pour pousser l’autre à la faute, sauf que la relation malsaine qu’ils entretiennent n’est crédible à aucun moment. L’éminent professeur n’a objectivement aucune raison d’être obsédé à ce point-là par cet étudiant propre sur lui, sans aspérité aucune.

Pourquoi cette fascination ? Pourquoi ce meurtre et surtout comment ? Goldfrid signe là un scénario à trous qui zappe des scènes nécessaires à la cohérence du récit. Et la seule interrogation qui vient à l’esprit à la fin du film se résume à «oui, et alors ?».

Titre original : Tesis sobre un homicidio

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Durée : 106 mn


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