Essences de surhommes
D’emblée, l’exposition opère une sélection drastique au sein de l’œuvre de DC Comics. Au lieu d’un discours transversal plus audacieux et plus novateur, elle se contente de recycler les portraits mille fois entendus d’un solaire et christique Superman, d’un Batman névrosé voire sociopathe, et d’une Wonder Woman farouche amazone. Certes, ces caractéristiques correspondent en grande partie à ces personnages ; mais ce qu’oublient de mentionner les quelques panneaux informatifs, en dépit d’une collection remarquable, c’est qu’une multitude d’auteurs, aussi bien graphiques, filmiques que télévisuels, ont investi ces figures et les ont façonné à leur manière.
Par-delà la présentation monolithique du trio émergent au travers des œuvres exposées de nombreuses évolutions dans les représentations : ainsi, Wonder Woman paraît de plus en plus guerrière et de moins en moins glamour à mesure que progressent les luttes féministes, Batman sombre davantage dans la noirceur et la psychose sous la plume d’un Frank Miller, et le costume de Superman noircit toujours plus à chaque film après le 11-Septembre. Mais ces mille nuances n’apparaissent pas dans le discours très classique, plus porté sur une pseudo-essentialisation des super-héros, réduits à leurs représentations archétypales, que sur une analyse chronologique. Et surtout, qui néglige une question primordiale : en quoi DC se distingue de Marvel ?
photo : Musée d’Art Ludique
Collection fétichiste
Certes, une exposition qui rend hommage à une culture dont la vivacité égale le mépris qui l’afflige est chose louable. Encore faut-il s’entendre sur ce qu’on appelle « rendre hommage » : si cela signifie enfermer la créativité dans l’enceinte close du musée, si cela conduit au haro des « institutions » culturelles sur les arts populaires, on s’en passera.