Vanessa Paradis dans un film du producteur Paulo Branco, la rencontre promettait de faire des étincelles. Après le succès de L’Arnacoeur, on espérait que l’actrice-chanteuse marche sur les pas des films de Raoul Ruiz et dévoile une étrangeté encore sous-exploitée sur grand écran. Mais il n’en est rien : Kreuter confie ici à Paradis son traditionnel rôle d’adolescente amochée par la vie (on songe à Elisa, La Fille sur le pont), et par son personnage, et le film bascule, d’un coup d’un seul, vers la fable poétique. Celui qui espérait en savoir plus sur Dubai (historiquement et socialement) en sera ainsi pour ses frais : réduit à des silhouettes muettes, le film oublie les autochtones et, quand un personnage dit expressément sa volonté de ne parler "ni de politique ni de religion" , le film s’enferme alors dans une carte postale inutile.
L’errance poétique est un genre cinématographique en soi, mais Dubaï Flamingo n’a ni sens épique ni charme vagabond : la faute à des dialogues bâclés, à des situations qui semblent improvisées lors du tournage et à une certaine laideur visuelle qui cultive le goût du décor bric-à-brac et du gros plan brutal. En réalité, Delphine Kreuter poursuivait une jolie idée avec ce road-movie dans un pays qui a la taille, rappelons-le, d’un département français et Dubaï Flamingo est d’autant plus étrange qu’on sent la réalisatrice tenaillée par une volonté de parler du couple ; un peu comme si Antonioni cherchait à filmer le désert en mettant des lunettes de farce et attrape. Mais par son casting chic et toc, son amour des petits accessoires, son bricolage de clip, Dubaï Flamingo n’est rien de plus qu’un ovni sorti tout droit des années 90.