Festival de Cannes 2022 – Jour 12

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Un goût doux amer, et la nave va…

Et voilà, c’est fini. Le festival de Cannes s’est achevé un peu comme il avait commencé, entre agacement et découvertes. Mais c’est vrai qu’il manque de parenthèses enchantées, de petits bistrots sympathiques pour échanger autour d’un verre, d’un film. Notre monde peuplé de businessmen et d’influenceuses manque totalement d’imagination et de poésie. Alors, on a les festivals qu’on mérite sans doute. Pour moi, ce sera sans doute mon dernier. J’y remettrai sans doute les pieds un jour ou deux, pour voir qui sait ? Mais plus jamais, je ne tenterai de le couvrir, c’est épuisant et frustrant. Quelques mots sur la soirée de clôture à laquelle j’ai eu la chance, une fois n’est pas coutume, d’assister. Mais quelle barbe… Je me demande à chaque fois, qu’il s’agisse de Cannes ou des Césars, quelle est la confrérie qui aurait l’outrecuidance de se congratuler en public avec autant d’indécence que de suffisance. C’est encore plus choquant qu’à Cannes, ainsi que je le faisais remarquer un des jours précédents, les métiers techniques ne sont pas représentés à la différence des Césars. Cela a a aussi un côté grand-messe avec Virginie Efira en grande prêtresse mais sobre et distinguée pour une fois, le président du jury en grand maître accompagné de ses jurés. Le décor oscille entre Plus belle la vie et 12 hommes en colère. Mais c’est à une sorte de Star Academy soft à laquelle nous avons assisté, tout le monde bien à sa place et l’applaudimètre à fond la caisse. Vincent Lindon cite Le Guépard en attribuant la célèbre citation de Lampedusa à Alain Delon : « Il faut que rien ne change pour que tout change ». Il ne pouvait pas mieux dire, c’est exactement ce qu’il se passe avec le festival. Efira fait joliment de l’humour, la grande dame du cinéma français, Carole Bouquet, tente en vain de casser son image en embrassant Vincent Lindon sur la bouche. Rien ne restera dans les mémoires, et surtout pas les films sélectionnés comme si le jury avait essayé de plaire à tout le monde. En tout cas, on vérifie encore une fois que la critique de cinéma n’est pas une science exacte : seul Decision to leave de Park Chan-Wook a obtenu une récompense et encore pas dans la même catégorie que celle que je préconisais : Prix de la mise en scène au lieu du Prix du scénario. Pour le reste, j’ai tout faux. Le prix de la Fipresci, quant à lui, va à Leila et ses frères, film pour lequel je rêvais de la Palme d’Or. Ça me rassure quant à mes goûts et je pense que la Fipresci n’a plus trop sa place à Cannes qui ne s’occupe plus de cinéma mais de communication et de faits de société. Quant à Close, il reçoit le Grand Prix ex-aequo, c’est quand même un peu disproportionné, je trouve. Et puis un jury qui ne cesse d’inventer des ex-aequos, c’est assez louche tout de même. Quant à la Caméra d’or attribuée à War Pony réalisé par Riley Keough et Gina Gammel, c’est un peu ahurissant quand même, tout comme l’idée de créer un Prix spécial du 75ème anniversaire pour l’offrir aux frères Dardenne, puisque le jury ne pouvait pas leur décerner décemment une troisième palme d’or… Du coup, ça leur laissait le champ libre d’attribuer une deuxième palme d’or à Triangle of sadness (Sans filtre), après The Square, réalisé par Ruben Östlund que, personnellement, j’ai adoré. Et vous le savez bien si vous suivez notre chronique. Mais je ne pensais pas que le jury le choisirait, surtout comme Palme d’or, car il n’est pas vraiment consensuel et c’est pourquoi je pensais à son acteur principal, Harris Dickinson, pour le prix d’interprétation. Bref, tout cela est tout mélangé comme si un dieu facétieux (sans doute pas Vincent Lindon) avait soufflé sur le jeu de cartes. Et je serais curieux de savoir pour qui a bien pu voter Ladj Ly. Enfin, non mais allô quoi ! tout le monde est crevé et tout le monde s’en fout. Pour le détail, c’est par ici. Ce qu’il faut surtout noter c’est qu’il n’y a rien de rien pour Valeria Bruni-Tedeschi, Kirill Serebrennikov, Albert Serra, Saeed Roustaee, Cristian Mungiu, James Gray, Mario Martone, Arnaud Desplechin, etc. A croire que le jury a voulu se démarquer des valeurs sûres. Heureusement, Jerzy Skolimowski, qui a eu une breloque, a fait hi-han sur scène. Il a bien trouvé le mot de la fin…

Pourtant quelques pensées m’assaillaient lors de ma promenade en bateau samedi matin pour échapper un peu à la domination des images :

  • Ne jamais douter de la beauté du monde
  • Ne jamais trop croire à la force des images
  • Rester toujours humble et modeste
  • Se souvenir qu’il faut vivre avant tout
  • Jamais un festival ne remplacera la vraie vie
  • Trouver en chaque chose ce qui est beau
  • Penser toujours qu’on n’est pas immortel
  • Rien n’est jamais juste une image
  • Jamais un coup de dé n’abolira le hasard
  • Tenter de deviner de quel côté tombera la tartine
  • Memento mori
  • Savoir quel est l’endroit idéal pour soi pour attendre la fin du monde.

 

Mon mot de la fin (de Hugo) :

Voici donc venir la fin de ma première couverture festivalière. Ce fut intense, prenant, parfois frustrant, mais le Festival de Cannes serait-il Cannes sans son lot de tensions et de prises de têtes ? Pour ma part, j’espère que l’aventure ne fait que commencer et que j’aurai l’opportunité de vous retrouver, chers lecteurs, dès l’année prochaine. Je crois savoir que Jean-Max a probablement l’intention d’arrêter l’aventure de la couverture cannoise. Si tel devait être le cas, je suis sûr que l’année prochaine, savourant ses vacances bien méritées, tout en sirotant son cocktail sous les cocotiers, il s’amusera comme un fou à nous lire, nous qui retournerons au front l’œil vif et l’esprit affûté.

  • Les quelques pensées qui me traversent l’esprit en cet instant :
    –  Le cinéma vaut la peine qu’on se batte pour lui.
    –  Le monde est meilleur qu’il m’y paraît.
    –  Merde à Tic Toc, twitter et compagnie.
    –  Une vie sans art ne vaut pas la peine d’être vécue
    –  On trouvera toujours quelqu’un à qui transmettre une passion et le goût des jolies choses.
    –  On peut toujours s’améliorer, se transformer et se débrouiller pour trouver son bonheur.
    –  Je ne crois pas en la destinée, mais dans le hasard, donc : tout est toujours possible.
    –  Il ne faut jamais confondre son rêve avec celui des autres et vice versa.
    –  Il n’y a pas de plus profonde solitude que celle du samouraï, si ce n’est celle d’un tigre dans
    la jungle.
    Je rends maintenant l’antenne…

Hugo Dervisoglou et Jean-Max Méjean

Pour Valeria, en hommage ! On t’aime.

 

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