Un hiver en été

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En attendant la fin du monde, on se gèle et on s’engueule…

Il fait froid (ou pas)

Laetitia Masson, très connue et reconnue par le petit cénacle des critiques parisiens branchés depuis notamment En avoir (ou pas) en 1995 et Pourquoi (pas) le Brésil en 2004 revient en force cette année avec ce film événement qui va faire grincer des dents (ou pas)… Pour ce film entre sociologie et science-fiction, la réalisatrice a convoqué tout le gratin (ou presque) du cinéma français. Certains acteurs ont compris l’enjeu pas toujours évident et d’autres ont suivi à la lettre (ou pas) les indications sans doute très floues du scénario et ça se voit. Alors déjà l’affiche en impose, mais on espère que les spectateurs ne feront pas trop la gueule à la sortie en estimant avoir été quelque peu floués : Benjamin Biolay, Elodie Bouchez, Judith Chemla, Nicolas Duvauchelle, Hélène Fillières, Nora Hamzawi, Cédric Kahn, Jérôme Kircher, Pablo Pauly, Rafi Pitts, Clémence Poésy et Laurent Stocker. Pas moins. Ca, c’est pour le casting. Côté scénario, Laetitia Masson déclare elle-même dans le dossier de presse du film qu’elle a mis presque quatre ans pour l’écrire toute seule du fait qu’elle a été interrompue par le confinement. Il faut dire qu’il s’agit bien là d’un film post-confinement, très flippé et volontiers mortifère, avec des relents de Fahrenheit 451 de François Truffaut et du jour d’après de Harald Kloser, mais fauchés. C’est la fin du monde, on le sent parce qu’il fait vraiment très froid en été. Alors du Sud au Nord, et l’Est en Ouest sans oublier bien sûr Paris le centre du monde, Laetitia Masson balade sa caméra pour filmer des gens qui s’ennuient ou qui friment, on ne sait pas trop bien. En tout cas, ils attendent la fin du monde et nous la fin du film… 

Un peu trop foutraque

« Ici, je voulais créer des personnages qui s’affrontent deux par deux, comme en duel, déclare la réalisatrice, pour que l’on voie en même temps l’intime et le collectif, l’argent et les sentiments, et des visions du monde opposées se confronter dans l’action. Ce sont des personnages à l’abandon, à côté de la société, ou de leur propre vie, mais leurs désirs résistent. » Ce sont de très bonnes idées mais, hélas, la sauce ne prend pas bien. Le spectateur se sent un peu prisonnier dans une histoire pré-apocalyptique qui n’est pas très intéressante, voire très frustrante car il n’arrive à se fixer sur aucun de ces personnages qui défilent un peu comme des marionnettes dans un jeu de massacre. Bien sûr, on pourra toujours arguer que cette oeuvre est étonnante, innovante, ou je ne sais trop quoi encore en …ante mais il faut quand même reconnaître que tout ceci est un peu de guingois, pas trop déterminé, « ni fait, ni à faire » aurait dit ma grand-mère. En tout cas, et là on ne peut qu’acquiescer, c’est le néolibéralisme qui est le grand responsable, non mais…

Une pléiade d’acteurs

Les acteurs, on l’a déjà dit, sont tous assez paumés. On dirait qu’ils n’ont même pas lu le scénario avant d’être balancés sur le plateau, avec juste trois indications sur qui fait quoi, et avec leurs costumes. Carole Gérard, la costumière, a dû s’en donner à coeur joie et le budget de ce département ne devait pas être trop restreint. La directrice de la photographie, Emmanuelle Collinot, a fait des miracles dans des tons pastels qui rendent hommage aux fameux nymphéas, notamment dans cette oscillation permanente entre le musée de l’Orangerie où ils sont enfermés et la maison de Monet où ils explosent dans la nature. Et le fait de s’y rendre physiquement à la fin du film est plutôt une bonne idée. Quant au monteur, Alexandre Auque, il n’a fait qu’obéir bien sûr en collant bout à bout ces dizaines de tronçons épars de champ contrechamp et d’errances pseudo existentialistes. Un film qui va nous raser et fera jaser. 

Titre original : Un hiver en été

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Durée : 112 mn


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