Spy

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Une parodie de film d’espionnage réussie, par le réalisateur de « Mes meilleurs amies ».

Spy en juin, Spectre (Sam Mendes) en novembre et Le pont des espions (Steven Spielberg) prochainement, 2015 est l’année des agents secrets. L’année cinématographique avait d’ailleurs commencé par une tentative de comédie d’espionnage, Kingsman, aussi tristement laid que désespérément crétin tourné par un réalisateur (Matthew Vaughn) en pleine crise d’adolescence tardive, persuadé, quelle naïveté, qu’il suffisait de dire « fuck » et « prout » ou de montrer des fesses pour être drôle et politiquement incorrect. Pauvre garçon qui s’excitait tout seul dans son coin comme si les Farrelly, Apatow ou Feig n’existaient pas. Spy de ce même Paul Feig est, heureusement, aux antipodes de Kingsman en ce qu’il arrive à être très drôle et vulgaire sans pour autant négliger sa mise en scène.
 

Petite, ronde, mal fringuée, Susan Cooper (Mélissa McCarthy) n’a pas le look d’un agent secret de la CIA, et pour cause puisque ce n’en est pas une. Enfin, pas tout à fait. Son rôle est de murmurer à l’oreille de (oh) Bradley (you’re so) Fine (you blow my mind), un des meilleurs espions de l’Agence pour le guider dans ses missions, lui indiquer la position des bad guys et des issues de secours, au cas où. Jusqu’au jour où Fine (Jude Law) se fait assassiner par la fille d’un mafieux bulgare, lui-même exécuté par Fine alors même qu’il était en possession d’informations sur la localisation d’une bombe nucléaire que sa fille, Rayna (Rose Byrne) tente à présent de vendre à d’autres mafieux, raison même pour laquelle Fine cherchait à la neutraliser avant de se faire assassiner par cette même fille de. Tout ça pour dire que, sous le choc, Susan quitte finalement sa batcave et se porte volontaire pour remplacer Bradley.

Paul Feig réfute le teme de « parodie » pour qualifier son film, qu’il préfère définir comme une comédie d’action rendant hommage aux films d’espionnage. Objection votre Honneur, Feig joue sur les mots car étymologiquement « parodie » signifie « à côté de l’ode », soit à côté du sujet noble au style élevé. Suivant cette définition du Littré, Spy est quand même bien une parodie de film d’espionnage, comme OSS 117 (Michel Hazanavicius, 2009) l’était lui aussi. Ça a la musique d’un film d’action, du bon gros son américain qui tâche, ça a le look d’un film d’action, à commencer par un générique on ne peut plus bondien mais il y a toujours le pas de côté, pour ne pas dire la descente tout schuss en hors piste, qui vient nous rappeler que nous ne sommes pas tout à fait devant un film d’action. La méchante a la distinction cannoise des nouveaux riches de l’Est (quelque part entre Kim Kardashian et Une nounou d’enfer), Susan croit être logée au Crillon et atterrit dans un bouge glauque, et l’inventeur génial créé un aéropropulseur mais a la flemme de rallumer un PC. Tout est là, mais presque, ce presque qui tient au défaut ridicule ou à l’amateurisme de ces soi-disant austères professionnels.

S’il prend bien sûr en majorité au film d’espionnage, Spy emprunte également le schéma narratif classique du teen movie basique : le beau gosse du lycée perd un pari et doit sortir avec la fille la plus moche, ou la plus coincée ou les deux, qui, une fois ses lunettes et sa salopette enlevées et ses cheveux lissés, est en réalité très jolie. Dans Spy, la petite geek timide connue pour son amour des pâtisseries se révèle, elle, être une espionne redoutable aux exploits physiques dignes du million de vues sur youtube. Les acteurs sont au diapason de ce jeu sur les apparences.
Feig retrouve sa muse, Melissa McCarthy, déjà présente dans Mes meilleures amies (2011) et dans Les Flingueuses (2013), qu’il associe à l’actioner Jason Statham, et à l’ancien sex symbol Jude Law (pardon pour les groupies mais ses rôles de séducteur se sont raréfiés au même rythme que ses cheveux) pour jouer avec l’image qu’ils véhiculent tout comme il joue avec le genre du film. Statham au générique, c’est en général la promesse de bastons et de cascades à défaut d’être celle d’un bon film ; chez Feig (qui a écrit ce rôle spécialement pour lui), celui qui se présente lui-même comme un espion de premier plan, et dit pouvoir se recoller un bras arraché en s’aidant du bras valide, est en réalité abruti, voire complètement con.

Si les dialogues font pratiquement mouche à chaque fois, la mise en scène, elle, se prend peut-être un peu trop au sérieux mais le but est atteint, les rires sont au rendez-vous. Et maintenant, on attend Ghostbusters

Titre original : Spy

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Durée : 120 mn


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