Le cinéma noir américain se fait une toile à Saint-Denis du 4 au 10 février dans le cadre des 9e journées cinématographiques dionysiennes qu’accueille le cinéma L’Ecran. "Black Revolution" est un voyage à travers l’histoire du cinéma noir américain, l’arme que les cinéastes africains-américains ont trouvée, selon Boris Spire, le directeur de l’Ecran et de ce rendez-vous cinématographique, pour « affirmer leur identité (et) faire exister leur propre imaginaire ». Deux raisons ont motivé le choix de cette thématique. « La première tient du fait que le cinéma américain est très connu, mais que le cinéma noir américain l’est beaucoup moins. Contrairement à ce que l’on peut penser, ce cinéma n’a pas commencé avec la Blaxploitation, mais dès les débuts du cinéma », explique Boris Spire. "Black Revolution" est aussi le lien entre le Septième Art et l’actualité avec l’élection de Barack Obama. « Au moment où nous préparions cette rétrospective, il y a 6 mois, nous ne pensions pas à son élection mais au symbole qu’il représente. Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau dans une adresse à Barack Obama ont qualifié son élection de "victoire de la pensée de la diversité". Une pensée qui fait écho dans le monde et en France.
La programmation de Black Revolution couvre le cinéma noir d’avant-guerre avec des films comme The symbol of the unconquered (1920) d’Oscar Micheaux, les années 60-70 qui voient la naissance d’un cinéma inspiré de la lutte pour les droits civiques. « Au terme de cette période, souligne Boris Spire, la Blaxploitation tient une place fondamentale parce qu’elle marque la fin de ce combat. Le mouvement débute avec quelques films politiques, mais très vite, il commence à véhiculer des stéréotypes.» La nuit du samedi soir sera consacrée à quelques unes des œuvres marquantes de ce cinéma qui disparaît au milieu des annés 70 à cause de ses excès. Si Sweet Sweetback’s Baadasssss Song (1971) se démarque de la Blaxploitation, il en marque néanmoins le coup d’envoi. Son réalisateur, Melvin Van Peebles, et Charles Burnett,sont les invités de la rétrospective. « Ils sont les plus connus, analyse Boris Spire, et ont ouvert la voie aux réalisateurs africains-américains ». Melvin Van Peebles, c’est La Permission en 1967, puis Watermelon man (1970), l’unique production hollywoodienne de ce cinéaste indépendant. Le réalisateur présentera par ailleurs son dernier film en exclusivité à Saint-Denis, Confessionsofa Ex-Doofus-ItchyFooted Mutha. « Charles Burnett est aussi un cinéaste indépendant issu du mouvement des droits civiques. Ces films ont la particularité de se dérouler dans le ghetto de Watts où se sont déroulés de sanglantes émeutes raciales. Son approche reste très ancrée dans le réel », précise Boris Spire. "Black Revolution" présentera aussi les films des cinéastes qui ont été inspirés par ses deux grands réalisateurs, notamment Spike Lee avec Malcom X. Il illustre la relève de ce cinéma noir engagé à l’aube des années 90. La rétrospective s’attarde également sur les liens entre l’Afrique et les Africains-Américains, à travers les œuvres du cinéaste d’origine éthiopienne, Haile Gerima. Son film Sankofa, dont le sujet est l’esclavage, est l’une de ses oeuvres qui seront projetées.
Cependant, "Black Revolution", ce n’est pas que du cinéma. Les spectateurs sont invités à découvrir la littérature et la musique qui accompagnent l’éternelle quête identitaire des Noirs américains.