La Trilogie du Vice. Sortie combo Blu-Ray+livret chez Artus films.

Article écrit par

L’ étrange vice de madame Wardh/Toutes les couleurs du vice/Ton vice une chambre close dont moi seul ai clé : un triptyque giallesque sulfureux à l’envie orchestré de main de maitre par Sergio Martino.

Deux westerns, plus d’une quinzaine de comédies, (essentiellement des  sexy comédies), des polars de facture classique, de l’horreur, du post -nuke…,  éclectique comme savent l’être les réalisateurs du cinéma bis transalpins, Sergio Martino a, grâce à ses incursions dans le Giallo, marqué le genre de son empreinte. La trilogie du vice qui sera suivie plus tard par  La queue du Scorpion et de Torso illustre avec sensualité son art du crime en série.

Point commun à ces trois titres – sur lequel nous reviendrons plus loin -, les présences d’Edwige Fenech en victime potentielle et Ivan Rassimov en inquiétant suspect.  L’étrange vice de madame Wardh (1971) et Toutes les couleurs du vice jouent sur le doute entourant l’état mental de la jeune femme : un tueur  sévit dans les parages, mais ses angoisses sont-elles réelles ou le fruit de traumatismes psychologiques ? Dans Ton vice une chambre close dont moi seul ai clé, la fragile et faussement candide objet de tous les désirs a laissé la place à une femme beaucoup plus sure de ses intentions. Dans cet article, plutôt que de s’attarder sur les différents scénarios, dont on préfère vous laisser découvrir les multiples twists et méfaits en tout genre ; effleurons l’habilité de Sergio Martino, lorsqu’il s’agit d’apporter sa  touche personnelle aux vénéneuses variations de  sang et de sensualité que peuvent être les Gialli.

La pesanteur du doute

Comme le souligne avec pertinence Emmanuel Le Gagne dans « Les vices cachés de Sergio Martino », le très précieux et riche livret qui accompagne les supports vidéo, l’une des singularités de Sergio Martino est de nous projeter dans la peau de la victime. Ou, plus précisément dans son esprit torturé, dans lequel s’entrechoque les ressacs de ses désirs refoulés et l’angoisse de voir sa vie ne tenir qu’à un fil, menacée par un tueur de plus en plus proche d’elle. Chez Martino, les scènes de cauchemar éveillé, inhérentes au genre, outre d’être nombreuses – tout particulièrement dans Toutes les couleurs du vice – et  proprement saisissantes, se doublent d’une dimension surréaliste. Variation  des cadrages improbables, surimpression, objets animés, hystérisation des visages, la mise en scène  multiplie les outrances  pour brouiller les liens avec une éventuelle réalité : comme dans la scène inaugurale et celles du Sabbat dans Toutes les couleurs du vice, ou dans celles liées au chat noir dans Ton vice une chambre close dont moi seul ai clé. Au même titre que chez Argento, les lieux publics sont curieusement désertés, et les lumières du jour cèdent très rapidement et anormalement leur place à une obscurité menaçante. S’en suivent des poursuites où le jeu sur les focales, les angles de vue et les distorsions  transforment chaque espace en un piège infernal. Mais, au lieu de recourir à un montage nerveux, le rythme est simplement et légèrement accéléré par une bande son plus tonique. Une pesanteur qui confine les personnages dans leurs cauchemars. Ce refus de booster en permanence ces métrages créent des « coup de mou »  situés peu avant le dernier tiers des récits, un peu trop répétitifs par ailleurs. Autre singularité la colorimétrie se veut moins contrastée que le genre se le permet le plus souvent. Une photographie douce, élégante même, plus romanesque, comme dans les belles productions horrifiques hollywoodiennes que peuvent être La malédiction (Richard Donner, 1976).

 

Corps à prendre

Cette très relative lenteur des péripéties policières et horrifiques s’associe parfaitement à la sensualité qui ne cesse de trouver sa place. L’érotisme se déploie en toute connivence et sans retenue.  Célébration des corps féminins : jupes courtes et décolletés pigeonnants.  Pulsions scopiques encouragées par les portes négligemment laissées entrouvertes lors des changements de tenue. Scènes de douche et de baignoire, en guise ou non d’appétitif avant l’irruption sanglante d’une arme blanche. Le motif à l’origine Hitchcockien du meurtre en cabine, atteint comme chez De Palma des températures hautement brulantes. Les corps fougueux profitent de la moindre occasion pour célébrer leur désir dans de longues scènes enclenchées par des échanges  empruntés aux scénarios et dialogues des plus prosaïques films érotiques. Les héroïnes profitent de toutes les occasions pour frémir devant les deux archétypes de masculinité qui s’affichent avec leur arrogante assurance. Ténébreux George Hamilton, présent dans les deux premiers opus, glaçant Ivan Rssimov dont le regard bleu est tout aussi envoutant dans chacune de ses trois interprétations, quelque soit sa coloration capilaire. Si les beautés féminines sont les seules à être exhibées dans le plus simple appareil, elles ne manquent jamais l’occasion d’affirmer leurs désirs les plus profonds et de revendiquer la parité en termes de libertinage. Exemple parmi tant d’autres : « Tu ne peux pas tout trouver dans un seul homme », encourage l’amie de Julie (Edwidge Fenech) dans L’étrange vice de madame Ward.

Créature fragile au teint de porcelaine dans les deux premiers titres, piquante et radieuse comme les beautés du sud de l’Italie dans Ton vice est…., la comédienne française Edwige Fenech capte la lumière sous tous les angles, en égérie complice de Sergio Martino. Elle ne se contente pas de se monter peu avare au moment de dévoiler ses charmes, tout du long, elle compose avec engouement et finesse des personnages émouvants et nuancés. Après les deux premiers épisodes de la trilogie, le réalisateur et la comédienne aurait du se retrouver pour un autre Giallio, La queue du Scorpion (1971), enceinte Edwige Fenech  sera remplacée par Anita Strindberg,  dont nous avons louée le magnétisme dans notre article sur Qui l’a vue mourir ? ( Aldo Lado, 1972). Ensemble, elles forment avec Edwige Fenech un diabolique duo de charme dans Ton vice est …

Merci à Artus films pour l’édition de ces trois Whodunit, où il est si agréable de sentir coupable de de céder à la tentation du plaisir des yeux.

La Trilogie du Vice. Sortie combo Blu-Ray+livret chez Artus films.

 

 

 

Titre original : Lo strano vizio della signora Wardh/Tutti i colori del buio/Il tuo vizio è una stanza chiusa e solo io ne ho la chiave.

Réalisateur :

Acteurs : , , ,

Année : ,

Genre : , ,

Pays : ,

Durée : 100*3 mn


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi