Jumanji : Bienvenue dans la Jungle

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Rien que pour Jack Black en avatar de midinette.

Après le succès de Bad Teacher (2011) ou encore de Sex Tape (2014), Jake Kasdan, adoubé par Judd Apatow, propose aujourd’hui une suite au film de Joe Johnston avec le regretté Robin Williams. Jumanji : Bienvenue dans la Jungle n’a certes pas obtenu de prix à Cannes ou à Berlin, mais il faut le prendre pour ce qu’il est : un divertissement bon enfant et plutôt sympathique, qui, mine de rien, nous interpelle aussi sur notre rapport au virtuel. Ici, en effet, le jeu dans lequel les quatre adolescents atterrissent, acquiert une importance capitale, puisque s’ils perdent les trois vies dont ils disposent, ils ne pourront revenir dans la réalité et resteront à jamais prisonniers de cette jungle.
 


Une hybridation réussie

Les scènes d’actions, marquées par leur célérité, sauront distiller leur petit frisson, par une faune très variée comptant rhinos excités, reptiles sans pitié, hippopotames gigantesques et un méchant pour le moins inquiétant duquel sortent littéralement insectes et serpents. Le film pense cependant en même temps à nos zygomatiques, apportant avec lui son lot de scènes comiques. Non sans fantaisie la midinette égocentrique Betthany qui passe son temps à poster – même en cours pendant un contrôle d’anglais – des selfies sur les réseaux sociaux se retrouve ainsi métamorphosée en un Jack Black tout aussi corpulent qu’ilarant. La scène où celui-ci donne un cours de séduction à Ruby Roundhouse, avatar de la timide Martha, dilatée d’ailleurs avec bonheur, se hisse au rang de morceau de bravoure burlesque du film. La séquence suivante est également hilarante, voyant la rousse se déhanchant avec maladresse puis ne cessant de secouer ses cheveux dans tous les sens, le professeur Sheldon Oberon alias Jack Black ayant insisté sur le rôle moteur de la séduction capillaire. Les autres acteurs également, au premier rang desquels le bodybuildé Dwayne Johnson en avatar d’intellectuel pas très musclé, font preuve aussi d’une belle autodérision dans cette série de contre-emplois réjouissants.
 


Morales et clés de vie

Enfin Jumanji : Bienvenue dans la Jungle délivre aussi des morales pas déshonorantes – même si non révolutionnaires – sur le fait de s’assumer et de s’accepter tel que l’on est, et aussi autour de l’importance du groupe, de la communauté, de l’amitié et de la notion de solidarité. Cette aventure hors du commun va permettre aux quatre adolescents de se développer et de changer. Betthany va finalement proposer à son amie médusée une escapade dans la nature et préférer ses vrais amis à ceux sur Facebook ou Instagram, Fridge va cesser d’avoir honte de Spencer – auquel il demandait d’écrire ses devoirs d’histoires tout en s’entêtant à le dédaigner -, tandis que Spencer et Martha vont oser se déclarer leurs sentiments réciproques et vivre leur amourette. Pour chacun, l’immersion dans le jeu aura eu une fonction déclencheuse et initiatique.

Ce dosage et ce rythme sont plutôt à apprécier et imputables sûrement aux cinq scénaristes à l’origine du script : Jake Kasdan lui-même, mais aussi Chris Mc Kenna, Eric Sommers, Scott Rosenberg et Jeff Pinkner – et qui, grâce en plus à un casting au rendez-vous et une mise en image soignée, la 3D servant l’effet d’immersion dans le jeu, garantit un divertissement familial de fin d’année aussi appréciable aux Emirats Arabes Unis et au Brésil qu’en Inde et en Ethiopie.

Titre original : Jumanji : Welcome to the Jungle

Réalisateur :

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Durée : 119 mn


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