Comme une étoile dans la nuit

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Si d´habitude les films de famille faits en famille peuvent quelque peu horripiler, parce que tout le cinéma français semble fonctionner de la sorte, ce n´est pas le cas ici, même si les familles Stévenin et Féret sont réunies presque au grand complet avec leurs amis devant et derrière la caméra.

Pourquoi faire une exception et calmer son ire ? Simplement parce qu’il s’agit d’un des films les plus radicaux et les plus bouleversants réalisés sur l’amour et la mort. Inspiré d’un fait réel, comme pratiquement tous les films de René Féret depuis quelques années, le scénario ne peut laisser personne indifférent. Dédié à la nièce du narrateur et à son compagnon, ce film raconte donc une histoire vraie qui ne peut que nous bouleverser, d’autant qu’il est magnifiquement interprété par les deux protagonistes principaux à la fois sobres, graves et débordants de vouloir vivre. Ce n’est pas facile, on le sait, de reconstituer le réel, et c’est encore plus malaisé de montrer la douleur, la maladie et la mort sans sombrer dans le pathos ou le mélo.

Jouant sans cesse sur ces limites, René Féret réussit l’exploit de nous émouvoir sans forcer la note, tout en demeurant à la fois réaliste et poétique. Durant une heure et demie, le spectateur a l’impression suffocante d’être lui-même entraîné dans cette catastrophe, parce que c’est de cela qu’il s’agit quand, chez un tout jeune couple, vient s’installer la maladie et son implacable évolution. Comment réagit alors celui des deux qui est en bonne santé ? Comment se comportent les parents ? Et les amis qui ne viennent plus vous voir parce qu’ils ont peur et culpabilisent ? Tout cela, et bien d’autres aspects encore comme la vie au quotidien et l’espoir qui ne doit pourtant pas vous quitter, est tellement bien rendu qu’à la fin les spectateurs, sur un Stabat Mater qui conclut le film, ne peuvent plus bouger de leurs sièges, comme s’ils étaient eux aussi au crématorium du Père Lachaise. Et on ne peut ainsi que se projeter dans cette série de causes et d’effets quand on a connu quelqu’un de gravement malade.

Voilà pourquoi ce film est tout à fait universel, pudique et impudique à la fois. Au début du sida, l’écrivain Hervé Guibert avait tenu à se filmer dans un documentaire unique portant le titre évocateur de, justement, La pudeur ou l’impudeur [1991]. Il avait ainsi ouvert une brèche dans l’omerta que fait souvent peser la maladie qui, comme la vieillesse et le handicap, n’inspire pas tellement le cinéma, cet art glamour et séducteur par excellence. Depuis, des portes se sont entrouvertes, notamment Les corps impatients [Xavier Giannoli, 2003] qui avait révélé le talent de Laura Smet dans le rôle d’une jeune fille atteinte du cancer. Avec Comme une étoile dans la nuit, nous sommes au cœur de la maladie, nous suivons pas à pas un couple qui voulait faire un enfant et qui va s’unir pour lutter, de manière désespérée, contre un intrus obstiné, cruel et absurde qui envahit le corps de Marc jusqu’à le détruire complètement. Sorte de réflexion sur Roméo et Juliette, pour un couple qui n’est pas écartelé par la famille et la rivalité, mais tout aussi cruellement, par un ennemi invisible et redoutable qui a pour nom Hodgkin et qui ne peut rien pourtant contre l’amour.

Titre original : Comme une étoile dans la nuit

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