Les Derniers Hommes

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UN FILM DE SURVIE SOUS TENSION AU CŒUR DE LA JUNGLE INDOCHINOISE;

9 mars 1945. L’armée japonaise lance l’assaut contre les dernières troupes françaises en Indochine. Traqué par l’ennemi, un groupe de légionnaires mené par l’adjudant Janiçki s’enfuit par la jungle pour rallier les bases alliées à plus de 300 kilomètres. « Les Derniers Hommes » est à l’origine un scénario imaginé et porté par Jacques Perrin, qui cherche un réalisateur depuis déjà plusieurs années lorsqu’il rencontre David Oelhoffen en 2015. Ce dernier, séduit par la dimension dramatique du projet, en prend les rênes et retravaille le scénario pour le rendre plus immersif, sensoriel et contemporain. Pari réussi.

LA JUNGLE POUR CONJUGUER RÉALISME ET LYRISME

« Les Derniers Hommes » met en scène la réconciliation de l’Homme avec la nature. C’est un film de survie qui doit l’efficacité de sa tension au décor dans lequel les personnages évoluent. On ne quitte en effet jamais la jungle, qui apparaît presque comme un personnage à part entière, tantôt salvateur tantôt hostile. La guerre qui s’y déroule est silencieuse, et le silence de mise, l’ennemi invisible qui s’y terre pouvant surgir de la végétation à tout moment. Les spectateurs partagent dès lors la peur primale des soldats, de même que toutes les émotions qui les assaillent. Cependant, si le récit se concentre principalement sur quelques-uns des légionnaires du groupe, les autres auraient mérité d’être davantage approfondis tant dans leur psychologie que dans les rapports qu’ils entretiennent entre eux. Le groupe n’en aurait été que plus incarné.

Cette proximité avec certains protagonistes s’exerce jusqu’à travers la folie qui les gagne, comme c’est le cas avec Lemiotte. Serpents venimeux, stress, hallucinations, faim et soif sont autant d’obstacles qui viennent entraver le périple des soldats et leur faire perdre pied. La jungle apparaît dans ces moments comme un espace funeste et teinté d’onirisme. On regrette cependant que ces occurrences lyriques restent en surface et ne soient pas davantage exploitées, car elles permettent de nuancer le réel en mettant en lumière toute son aberration.

L’ABSURDITÉ DANS TOUTE SON HORREUR

« Si les gens sont si méchants, c’est peut-être seulement parce qu’ils souffrent, mais le temps est long qui sépare le moment où ils ont cessé de souffrir de celui où ils deviennent un peu meilleurs. » ; cette citation de Céline, tirée du Voyage au Bout de la Nuit et prononcée par un des personnages, résume bien le propos du film quant à l’absurdité de la guerre. Propos illustré également à la suite de cette scène de combat, lorsque la vie continue comme si de rien n’était après que les hommes ont fini de s’entretuer. Le silence revient, les insectes vaquent à leurs occupations, l’eau dilue le sang et la rivière achève d’avaler les cadavres. On assiste à une banalisation progressive de la mort, qui finit par intervenir quotidiennement, par fatalité.

Ces hommes dont on observe la déroute sont en fait abandonnés. Ce sont des légionnaires – étrangers donc – qui se battent pour l’empire colonial de la France, dans un territoire avec lequel ils n’entretiennent aucun lien. Perdus en pleine jungle, coupés du monde, il ne leur reste plus que leurs grades et leurs uniformes auxquels se référer. C’est la guerre qui donne paradoxalement un sens à leurs vies. Cette situation s’applique tant aux légionnaires qu’aux soldats japonais qui, invisibles durant la première partie du film, sont montrés et ainsi humanisés par la suite. Eux aussi sont en réalité des victimes du conflit.

 

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Durée : 120 mn


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