John Rambo (Rambo)

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On attendait une série B bas du front. Mais ce dernier Rambo frappe fort. Subversif et traumatisant, le film de Stallone, en plus d´être solidement réalisé, transgresse de nombreux tabous, notamment dans son rapport à la violence.

On ne le dira jamais assez : la double tentative de come-back opérée par Sylvester Stallone était on ne peut plus risquée. La soixantaine entamée, usée par une flopée de navets déjà oubliés (Driven, Mafia Love, D-Tox, Spy Kids 3D, Les maîtres du jeu et même Taxi 3 !), la star italo-américaine décidait voilà trois ans de remettre les pieds sur le ring, pour un ultime combat de boxe, sobrement titré Rocky Balboa. Un retour aux sources effectué en toute simplicité, certes. Mais qui n’a pas frémis devant les premières images de ce boxeur au corps gonflé, noueux, aux veines trop saillantes pour être rassurantes ? Bravant les quolibets, ne faisant plus qu’un avec le personnage qui l’a rendu célèbre, « Sly » décidait de ne plus s’apitoyer sur ses combats gagnés, et de revenir, littéralement, sur le devant de la scène, aux forceps. Rocky Balboa avait ses qualités, et marchait principalement à l’affectif, l’acteur rallumant la flamme de cette saga sportive avec un plaisir communicatif.

Avec John Rambo, le problème se pose de manière différente. Le personnage est avant tout le produit d’une époque, et la saga repose sur une dualité plus politique que cinématographique. Tandis que le premier opus est un portrait en creux de l’Amérique post-Vietnâm, via sa figure de vétéran déchu, les deux séquelles personnifient la mentalité en vogue à la fin de la Guerre froide : le besoin de revanche des Américains face à leurs ennemis soviétiques. C’était la période des muscles bandés par l’effort, de la pose héroïque et des slogans définitifs (« Cette guerre-là, il faudra la gagner » proclamait l’affiche de Rambo II).

Vingt ans après, c’est donc moins une revanche que le héros recherche, que la paix de l’esprit. Les premières minutes du film, qui situent la zone de conflit où va évoluer ce bon vieux John (la Birmanie, redevenue tristement d’actualité à l’automne), servent ensuite à introduire un Rambo toujours installé en Thaïlande, qui chasse et pêche pour vivre. Bien sûr, le sang ne va pas tarder à couler. Rambo va une nouvelle fois se salir les mains, au sens propre du terme, pour sauver des missionnaires capturés par les soldats birmans. Malgré ce scénario-prétexte, Stallone ose placer son héros face à ses responsabilités. Un flash-back fait défiler les images des précédents films, la voix-off du personnage lance une phrase révélatrice : « Quand on vous y pousse, tuer devient aussi facile que respirer ». Oui, effectivement, Rambo aime être un tueur, c’est ce qu’il fait de mieux, et tant pis s’il doit être au-dessus de la société pour ça. Le choix narratif est osé, mais payant.

Il justifie, a posteriori, l’invraisemblable violence du film. Décapitations, démembrements, viols collectifs, meurtres d’enfants, éviscérations et corps éparpillés par l’impact des balles : à la sauvagerie de ses ennemis, le guerrier vétéran répond par des actes encore plus barbares, armé de tout ce qui lui passe sous la main : machette, couteau, arc, mitrailleuse… En faisant du stéréotype de Rambo une figure presque irréelle, surhumaine, avare de dialogues, attachée à des préceptes de vies simples (le début et la dernière séquence du film en témoignent), Stallone rappelle à l’homme son statut d’animal fonctionnant à l’instinct. Même les missionnaires se joindront au bain de sang final où Rambo, comme possédé, laisse éclater une rage longtemps contenue.

Cette dérive guerrière, abordée au premier degré, et qui fait parfois passer le long-métrage pour un film d’horreur, laissera un goût de cendres dans la bouche de plus d’un spectateur, soudainement mal à l’aise devant un étalage de violence loin du « fun » des années 80. John Rambo, sous ses atours de divertissement « bourrin », se révèle bel et bien être un film subversif et, par son ton intransigeant, aussi important et traumatisant que certains classiques du genre comme Il faut sauver le soldat Ryan, Croix de Fer, Requiem pour un massacre… ou Rambo.

Titre original : Rambo

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Durée : 90 mn


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