Ghost song

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Houston, Texas, en attendant l’apocalypse

Un film de l’Acid 2021

Présenté l’année dernière à l’Acid à Cannes, Ghost song est un film intéressant à plus d’un titre même pour les spectateurs peu amateurs de hip hop, de rap et de désespoir. Laissons le collectif de cinéastes de l’Acid – Aurélia Barbet, Diane Sara Bouzgarrou, Thomas Jenkoe, Jean-Robert Viallet – s’exprimer sur le film dans le dossier de presse : « Saisir le pouls d’une ville, en figurer des fragments comme un beat, pour poser un rythme, un état. Ghost Song s’ouvre comme un voyage nocturne dans les bas-fonds de Houston où errent des losers magnifiques qui illuminent la nuit comme un diamant noir. » Le ton est donné, le film est noir, outrageusement moderne dans sa facture et son propos, radical dans sa forme et poétique par son détachement des vicissitudes du réel texan, rappelant en cela la beat génération et ses excès, et les mises en images et musiques qui suivront par Andy Warhol et le Velvet Underground. A Houston, Texas, Alexandra, Will et Nate se débattent pour survivre dans une ville qui dévore les gens-comme les rêves. Ex-chef de gang ou gosses de riches reniés, chacun affronte ses démons alors qu’un ouragan approche. Ghost Song, la chanson fantôme, c’est la promesse d’un nouvel élan de vie, entre musique, hallucinations et espoirs de rédemption.

Hommage au cinéma

C’est un hommage aussi au cinéma par un réalisateur atypique à qui l’on doit déjà un premier long-métrage documentaire, Southern Belle, dans lequel il observe déjà une génération à la dérive au Texas. Venu du théâtre, et de la musique, il a su parfaitement dans ce deuxième long-métrage documentaire mettre en valeur l’horreur de la vie, de l’errance mais en les magnifiant par la lumière et la photo due à Laetitia de Montalembert, Francesco di Pierro et lui-même. Tandis que la ville attend une sorte d’apocalypse météorologique et électrique qui plane dans le ciel accompagnée d’éclairs insensés, des jeunes tentent de vivre. Le vent se lève, écrivait le poète sétois, il faut tenter de vivre. Ici, des jeunes rappeurs mettent en chorégraphie et en beat leurs espoirs et leurs désillusions.

Du travail d’improvisation

« Un jour, j’ai assisté à une engueulade entre Will et sa copine, quand tout à coup, il s’est mis à chanter du blues. C’est là que j’ai compris que c’est un vrai mode de communication. Il y a des choses plus faciles à exprimer en chanson pour lui, je m’en suis donc servi… Mais rien n’est jamais écrit. C’est une improvisation, entre réalité et mise en scène. Quand Bloodbath se cache avec sa copine dans la chambre de motel, c’est pareil, jusqu’au moment où la réalité reprend le dessus : il y a vraiment une puce de lit ! » C’est du reste cette séquence finale qui va rester dans les esprits, en raison de son côté réaliste et sordide. Il y a vraiment une punaise dans le lit et la caméra zoome vraiment sur elle, jusqu’à la grossir énormément. On réalise ici les vicissitudes de la vie et la menace de ces insectes minuscules, ainsi que les éclairs qui s’abattent sur un building à la manière d’une cage de Faraday. La vie est immense et pleine de dangers, semble nous dire Nicolas Peduzzi.

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Durée : 76 mn


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