Coffret « Strip-Tease », vol. 16, 17 et 18

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« Strip-Tease », c’est les gens qu’on croise dans la rue. C’est autre chose qu’un film qui se voudrait social. C’est la société même, avec tous les extrêmes qu’elle engendre.

Discourir à propos d’un épisode de Strip-Tease c’est, comme à propos d’un film, déjà l’interpréter. De nombreux détracteurs du système Strip-Tease argumentent sur l’innocence des gens filmés, sur leur inconscience face à ce que le montage peut façonner de leur image. Un montage, quel qu’il soit, manipule forcément des images. À bon ou mauvais escient, soit. Mais Strip-Tease fait-il concrètement passer le monde réel pour un monde de freaks ? Rien n’est moins sûr tant le message est influencé par chaque regard porté sur lui. N’est-ce donc pas plutôt le regard propre du spectateur qui choisit, lui, d’être consterné ou amusé ? Ce genre de documentaires place le spectateur face à des évidences et des constats proprement humains. Les films et reportages qui se concentrent sur des Monsieur Tout-le-monde, sur des « Michèle se rend au travail malgré ses trois cancers du sein » ou à propos de « Sonia Rolland vit la vie d’un sapeur-pompier », ne sont-ils pas incroyablement ennuyeux ? Ou sinon, qu’apportent-ils à notre regard de spectateur ? Rien. Ils nous rendent passifs. À l’inverse de Strip-Tease, qui inculque une autre logique, une autre philosophie, car si la bêtise est humaine, pourquoi n’en ferait-on pas franchement le constat ?

Sur toutes leurs productions depuis 20 ans, il est évident que les réalisations de Strip-Tease paraissent souvent aller trop loin. Et c’est le cas, l’exemple le plus récent étant l’épisode Recherche bergère désespérément diffusé cette année et qui enclencha une forte polémique médiatique, la famille dont la réalisatrice avait fait le portrait étant elle-même choquée de l’image qu’on lui prêtait. Avec Strip-Tease et c’est un fait, on est souvent dans les extrêmes, beaucoup moins dans la demi-mesure. Il n’est aucunement question de défendre ou de railler le concept Strip-Teasien mais de prendre conscience qu’il s’agit là d’un système hyper diversifié. Dans Strip-Tease, tout n’est certainement pas bon à prendre, mais lorsque le sujet capturé est hors norme, l’intérêt s’en voit décuplé. Ne cherchant pas à attiser moqueries, haine ou fanatisme, le but de ce concept est et a toujours été, et c’est cela qu’il faut saluer, de réveiller le spectateur télé.
 
 


Un grand-père incestueux, hors-champ, se voit confronté aux vérités de sa petite fille dans
Ma petite chérie.

Ce coffret comprenant les volumes 16, 17 et 18 inédits en DVD, propose une diversité d’épisodes pour certains exceptionnels. L’un d‘eux, Madame la juge, accompagne une juge d’instruction bruxelloise dans l’exercice de son travail (1). Au tout début, l’envie de rire est forte tant la juge paraît maboule, mais on se calme très vite en la voyant s’imposer face aux voyous et sur des scènes de crime. Elle n’est plus une juge mais une mère, une confidente, une conseillère. On se rend vite compte qu’elle n’est pas dingue mais impressionnante, pas ridicule mais époustouflante, et que des gens comme elle existent autour de nous.

Et puis il y a d’autres gens, comme cette petite fille violée par son pépé dans Ma petite chérie, où les vérités doivent s’affronter au sein d’un bureau de la brigade des mineurs (2). Un épisode qui ne nous fait pas rire mais qui nous prend aux tripes. Il y en aura encore beaucoup d’autres, certains risibles (Sorti du troupeau où un jeune mannequin belge est prêt à passer à la casserole pour devenir célèbre), d’autres extravagants (Rock’n’troll où elfes et lutins se baladent de façon ordinaire à travers le regard de gens extraordinaires) et cocasses (Pour la vie et les tatouages en guise de souvenirs). Quinze épisodes où le spectateur trouvera de tout et forcément de quoi se contenter.

Faites comme vous voulez. Personne ne vous oblige à regarder Strip-Tease…  Comme personne ne vous oblige à saluer les passants dans la rue.

Coffret "Strip-Tease", vol. 16, 17 et 18 – DVDs édités par les Éditions Montparnasse – Disponible depuis le 6 novembre.

(1) Juge qu’on avait déjà rencontrée dans Le Flic, la juge et l’assassin, d’Yves Hinant, un docu Strip-Tease d’1h30 aux allures de polar, passionnant, sorti en 2007.
(2) Ma petite chérie a inspiré Maïwenn dans la réalisation de Polisse (2011).


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