Un très beau film à l´italienne entre passion, déchirements, patience et réconciliation…
Après de belles réalisations comme Mon frère est fils unique (2006) et La nostra vita(2010), consacrées à la famille – que ce soit sous l’angle de la politique ou du deuil – le scénariste et metteur en scène italien Daniele Luchetti est en quête par le cinéma de croyances, espoirs et émotions à valoriser, amplifier, magnifier. Avec ce nouveau long métrage, Ton Absence, c’est une famille en Italie qui est au cœur d’une fiction sur l’amour, la séparation, l’expérimentation sensuelle. Sans tomber dans le cliché, et le réalisateur s’en défend en expliquant que la famille reste le seul vrai repère en Italie, Ton Absence nous emporte avec Guido et Serena dans un tourbillon de questions, de réactions sur l’amour dans les années 70, en 1974 précisément. Il est artiste contemporain, elle est sa femme, il est Casanova malgré tout l’amour qu’il lui porte, elle est fidèle jusqu’à en avoir marre de toutes ces tromperies. Leurs deux enfants, Dario et Paolo, sont témoins de leurs disputes, de leur amour passionnel et parfois irrationnel, ils se taisent jusqu’à l’explosion.
Alors le temps d’un été, le temps d’une rentrée, les deux amours se retrouvent, se déchirent, se recollent. Avec une grande poésie et une manière de filmer presque « vintage », très inspirée de Fellini, Daniele Luchetti signe son film le plus personnel. De la caméra Super 8, véritable jouet du fils aîné dans Ton Absence, sa propre caméra d’enfance, aux meubles et aux maisons qui sont les décors du film, tout rappelle la propre vie du réalisateur. C’est par cet aspect naturel, lié aux objets, à l’atmosphère, aux familles des trois côtés – la grand-mère paternelle, maternelle, la mère – que l’on s’attache très fortement aux personnages, que l’on comprend leurs réactions, que l’on s’identifie à chaque étape émotionnelle qu’ils sont en train de vivre. Le film devient le nôtre, sans limite ni recul.
La place de la femme ? Ce n’est pas un film féministe, même si une partie du long métrage est tournée en France, autour d’un groupe de féministes en vacances, militantes, se questionnant sur la condition de la Femme. Mais c’est un film féminin, sur l’amour avec un homme, sur l’amour avec une femme, sur le rôle d’épouse, de mère, de maîtresse. Très proche du film italien La prima cosa bella (Paolo Virzi, 2010), c’est par la femme que la fiction se construit, même si le rôle masculin est essentiel. C’est elle qui mène la famille, c’est elle qui est au cœur de la création artistique, des pulsions, des envies. Daniele Luchetti parle de sa propre femme, de sa propre mère et de son enfance, c’est lui et ses proches qu’il donne à voir, dont il s’inspire.
Filmé avec beaucoup de justesse, très « à l’italienne » avec des plans serrés proche de la matière, des visages, au plus près des émotions, Ton Absence est l’un des plus beaux films de Daniele Luchetti, le plus personnel et donc le plus risqué. C’est une véritable plongée au sein de la famille italienne, ses mystères, ses complexités, son charme. Que viva l’amore…
Difficile de passer sous silence une œuvre aussi importante que « Il était un père » dans la filmographie d’Ozu malgré le didactisme de la forme. Tiraillé entre la rhétorique propagandiste de la hiérarchie militaire japonaise, la censure de l’armée d’occupation militaire du général Mac Arthur qui lui sont imposées par l’effort de guerre, Ozu réintroduit le fil rouge de la parentalité abordé dans « Un fils unique » (1936) avec le scepticisme foncier qui le caractérise.
Avant de fixer sur sa toile de fond les sempiternels drames et bonheurs étales de la maisonnée japonaise moderne, Yasujiro Ozu réfracte à travers ses films de l’après-guerre la démoralisation d’une société égarée dans le chaos des sentiments et les privations de l’occupation avant la reconstruction.