Dans ce polar doublé de comédie, tout part d’une boîte de thon… Sandra (Cécile de France) n’est pas aimable, elle ne veut pas se mêler aux autres ni d’ailleurs sympathiser avec ses anciennes copines de Boulogne sur mer qui ne l’avaient pas revue depuis quinze ans. Pour l’ancienne Miss Nord-Pas-de-Calais qui avait fui sur « la Côte » avec de l’ambition plein ses talons compensés, ce retour – sans boulot ni diplôme – à la case conserverie locale sonne comme une régression. Et les choses vont très vite se corser avec les « avances » d’un chef harceleur qu’elle tue accidentellement… une scène mémorable « sur le fil du rasoir» qui s’inscrit dans la lignée des comédies trash déjantées, mâtinées d’influences « Tarantinesques ». Une sorte de western moderne dans lequel le réalisateur Alain Mauduit (deuxième long métrage après Vilaine, 2007) déploie toute son imagination, son goût du rocambolesque, et beaucoup de tendresse pour des personnages qui se bagarrent pour survivre. Le film a d’ailleurs reçu le prix Globe Cristal au Festival de l’Alpe d’Huez.
Une comédie sur « le fil du rasoir »
Avec pour décor les corons de Boulogne-sur-Mer et ses usines fermées, la comédie à 100 000 volts transcende les clichés des films sociaux dont il revendique néanmoins l’appartenance : « je trouve que le cinéma français manque de personnages de prolo avec lesquels on se marre. » raconte Alain Mauduit. Réchauffées par la lumière du directeur de la photographie Vincent Mathias, qui « accentue les bruns, les ocres et les jaunes », toutes les photos de repérage ont été étalonnées afin que l’esthétique soit fixée avant de tourner, à commencer par de nombreuses scènes à l’extérieur qui donnent « au film une dimension western et confrontent les personnages à la nature. ». Le port et son ouverture sur la mer vous plonge immédiatement dans son univers sombre, surréaliste.
Une comédie où la réalisation tout en pulsations, en punchlines, et en coups de « pelle » ne renie pas l’héritage de Les Tontons flingeurs (Georges Lautner, 1963) : les personnages se rendent coup pour coup, en particulier les femmes qui ont de l’oestrogène à revendre. Ces dernières, savoureusement campées par Cécile de France, Audrey Lamy et Yolande Moreau, deviennent maitresses de leur destin, elles ont le pourvoir d’agir et le prennent… « Elles n’ont pas besoin des hommes pour commettre des erreurs ou pour réussir. » explique le réalisateur qui ajoute « j’aime les films mettant en scène des femmes qui défient les conventions comme Bound, Thelma et Louise, ou Convoi de femmes… ».
Le film dans la mouvance « Girl Power », raconte la prise en main par trois femmes de leur destin, de manière trash. Une comédie noire, sanglante et réjouissante.