No dormiras

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À la manière d’un film fantastique, ce troisième film rate un peu sa cible, et devient assez vite caricatural et ennuyeux.

Une expérience à partir de l’insomnie
Annoncé par son titre comme un onzième Commandement, No dormirás se présente comme un film de genre, mais qui tourne vite en rond. Cette injonction émane d’une metteuse en scène hippie qui voudrait réaliser une sorte de happening théâtral dans un ancien hôpital psychiatrique. Ce troisième long métrage de l’uruguayen Gustavo Hernandez, après The Silent House repéré à la Quinzaine des Réalisateurs en 2010 à cause de son faux plan séquence, et Dios Local en 2014, inédit en France, regarde en direction du cinéma fantastique, et notamment de la New French Extremity d’Alexandre Aja, Xavier Palud et David Moreau. L’idée de départ lui est venue d’une expérience personnelle, après de longues nuits d’insomnie ainsi qu’il le confie dans le dossier de presse : « No dormirás est né d’une expérience personnelle après des nuits d’insomnie où mes sens étaient devenus plus vifs et la perception de mon environnement plus aiguë. J’ai commencé à faire des recherches sur l’insomnie et les répercussions du manque de sommeil sur le cerveau et le corps. J’ai trouvé qu’il serait intéressant de commencer à concevoir et développer le postulat d’une veillée extrême et prolongée. »


La métaphore d’une troupe théâtrale en huis-clos

Le film est donc bâti sur cette dimension insomniaque et devient, au fur et à mesure que les heures de veille grandissent, très angoissant d’autant qu’il est filmé dans un huis-clos aux couleurs glauques et avec une image de Guillermo Bill Nieto très sous-exposée. À ce niveau, le film est plutôt une réussite, mais il devient vite lassant car il n’a pas choisi de s’incarner dans le style du fantastique, voire du gore ce qui aurait été plus intéressant. En filant la métaphore de la troupe théâtrale bohême, avec une sorte de gourou et des disciples un peu dingues, qui veulent revivre dans le passé des protagonistes qui les ont précédés dans ce lieu, le film s’enferme dans une sorte de didactique un peu vaine. On comprend un peu trop vite que le sens de ce film horrifique, aux stridences peu modulées, veut en effet aborder le thème du sacrifice dans le domaine de l’art. Vraie proposition de mise en scène, ou maladresse narrative, le spectateur oscille entre thriller et fantastique, avec une question sous-jacente : « jusqu’où est-on prêt à aller par amour pour l’art et pour le succès ? » et qu’incarnent chacun à sa façon les personnages du film, tous acteurs volontaires et plutôt masochistes.


Un film cliché, mais pourtant audacieux

C’est certes parfois un peu maladroit, voire à la limite du cliché, mais on doit reconnaitre au réalisateur une certaine audace dans sa prise de risque notamment lorsqu’il reprend à son compte le procédé théâtral du théâtre immersif. D’ailleurs, Gustavo Hernández n’en fait pas mystère lorsqu’il déclare : « Un des thèmes de No dormirás est les limites de l’art et les sacrifices qu’un artiste doit faire pour créer son œuvre. C’est quelque chose qui, pendant longtemps, résonnait très fort dans ma tête et que j’avais besoin de transformer en film. […] Ce qui me fascine ce sont les différents liens qui unissent les hommes. J’ai grandi dans une grande famille, avec une douzaine de personnalités différentes sous le même toit. J’aime beaucoup quand je découvre dans les films différentes facettes d’une situation que je connais, mais avec différentes distorsions et une complexité nouvelle. » À ce stade, on peut dire que No dormirás peut être considéré comme une réussite, même si pour y parvenir le réalisateur a dû se résoudre à soumettre, non seulement les acteurs, mais aussi les spectateurs à la torture.

Réalisateur :

Acteurs :

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Durée : 104 mn


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