Des débuts prometteurs
Coline Abert est française et Last Dance est son premier film. Depuis, elle a coécrit le pilote pour la série Sisters, qu’elle a créée avec Laure de Clermont-Tonnerre (Nevada, Miss America) et a écrit le scénario du long-métrage Marie Tussaud produit par Studio Hamburg, un biopic sur l’artiste éponyme légendaire spécialisée dans les statues de cire. Une carrière déjà bien lancée et son premier film annonce déjà un grand talent. En effet, Last Dance est un documentaire haut en couleurs mais aussi très mélancolique sur une drag queen américaine qui, au moment de quitter la scène, rêve d’un ultime show à Paris. Paillettes, danses, disco et flons flons sont bien sûr au rendez-vous pour présenter ce personnage hors du commun avec sa tristesse, ses souvenirs, son école de drags et les ravages du temps qui passe.
Je vous présente Lady Vinsantos
Le film nous plonge dans l’intimité de Vinsantos DeFonte et de son personnage drag, Lady Vinsantos. Pendant trois ans, Coline Abert a suivi cet homme rempli de doutes sur son rapport à la scène et à ce personnage de femme qu’il a construit pendant plus de dix ans. Et c’est aussi l’histoire personnelle de cet homme, Vinsantos, passeur qui partage son art et sa passion par le biais de l’Atelier Drag de La Nouvelle-Orléans et qui accompagne ses élèves dans la construction de leur personnage de drag. Il est un lieu de rendez-vous essentiel pour la communauté, et un personnage à part entière ce long-métrage. Une scène du film va d’ailleurs présenter tous les élèves passés par cette école sur son perron et en grande tenue de gala.
Trouver sa drag
Le film se développe en trois parties : il débute par des entretiens avec l’artiste qui explique parfaitement comment il se situe dans cette mouvance et aussi dans la communauté gay dont il fait partie ipso facto mais sans revendications particulières. En effet, par leur aspect clownesque, baroque et hypertrophié – à la manière de la célèbre Divine immortalisée par Andy Warhol et surtout John Waters dont elle était l’égérie -, les drags participent bien sûr aux divers défilés de la Gay Pride notamment pour y apporter leur touche de provocation, mais leurs prestations se situent bien au-delà, même des cabarets de travestis comme chez Michou. Le drag est ailleurs, entre tristesse du clown et hypertrophie du sexe féminin à la manière surréaliste avec une petite touche de misogynie. La deuxième partie du film nous montre l’atelier en exercice et le spectateur sera étonné de la motivation de tous les participants, notamment quelques femmes, qui y viennent pour mieux se connaître et définir le personnage excentrique qui les définira désormais sur la scène par le vêtement, le maquillage, la démarche et, bien sûr, la danse et le chant. Enfin, le film se termine sur la réalisation du show parisien avec déambulations dans l’ex-ville lumière à la manière d’une Emily in Paris un peu déjantée. Car Vinsantos, présenté toujours avec l’homme de sa vie, son grand amour, possède toute la faconde du drag, comme une quintessence dont on devine cependant dans chaque sourire une larme briller. Bien sûr la réalisatrice s’explique sur son projet sans faire fi hélas de tout le verbiage actuel autour de la soi-disant notion de genre, on s’en serait passé hélas car son film est tout sauf ça et se suffit à lui-même fort heureusement : « Qu’est-ce que l’identité s’il n’y a plus de genre ? A la base, il y a une pensée très féministe qui consiste à montrer que le genre est une illusion. Questionner le genre revient forcément à questionner la norme. Oui, on peut être une femme qui « performe » en drag queen, pour devenir celle qu’on a envie d’être et qu’on n’est pas dans la réalité. »