C’est l’histoire de deux êtres pour qui la vie ne faisait plus sens. Lui, Cahit, bientôt la quarantaine, paumé, vivant seul dans une chambre-taudis, passant ses soirées à boire et à se battre. Il tente de se suicider. Elle, Sibel, jeune femme de confession musulmane, étouffée par une famille qui nie son droit au bonheur, quand bien même elle aurait envie de croquer la vie à pleines dents. Elle tente elle aussi de se suicider pour échapper au poids des traditions familiales.
Ils se rencontrent dans un hôpital accueillant les personnes ayant tentés de mettre fin à leurs jours. Ils s’enfuient, puis elle lui demande de l’épouser, un mariage blanc en fait, lui permettant de se soustraire à l’oppression exercée par sa famille. Il accepte à contrecœur.
Sur le ton du vaudeville puis de la comédie sentimentale, le film nous montre alors l’épanouissement de ces deux êtres. Sibel va enfin pouvoir jouir des plaisirs de la vie, et Cahit se reconstruit progressivement. Par la suite, on dérive largement vers l’histoire d’amour. Tous nos sens sont en alerte : un regard appuyé, un mot plein de signification, une odeur suave : de nombreux indices nous font comprendre que ces deux-là s’aiment, que c’est ensemble qu’ils redonneront sens à la vie.
Puis presque sans transition, le film verse dans le mélodrame, nous dévoilant alors une ambiance lourde et teintée de réalisme. Le récit semble être sur le point d’imploser à tout moment, à l’image de la protagoniste. Longue séparation, puis retrouvaille : les protagonistes doivent affrontent leur passé et leur ancien amour. Qu’en restera-t-il ? Un week-end torride, où les deux amants semblent libérés de toutes les chaînes dont ils étaient prisonniers. Avant que ne s’abatte le dénouement, cruel, sans concession, collant au plus près de la réalité.
Pourtant, tout n’est pas si sombre dans Head-on. Car au cours de ce périple initiatique prolongé sur plusieurs années, Cahit semble avoir repris confiance en soi et en la vie. Le personnage qui nous est présenté vers la fin du film est incroyablement différent du clochard du début. Son rétablissement moral et physique n’aura pas été un chemin sans embûches, mais le principal est bien là : il s’agit maintenant pour lui de vivre, encore et toujours.
Head-on est un film vraiment particulier, appuyé par des personnages fouillés et un scénario solide nous offrant une mélodrame poignant doublé d’une réflexion sur la situation des Turcs en Allemagne. Assurément un des piliers du renouveau du cinéma allemand du début des années 2000.