Every Thing Will Be Fine

Article écrit par

Le nouveau Wim Wenders, drame insipide en 3D.

Difficile d’être autre chose que dérouté face au dernier long métrage de Wim Wenders, tant Every Thing Will Be Fine, mélo sur le deuil qui manque singulièrement de finesse, semble vouloir cocher toutes les cases de la checklist inhérente au genre. Deuil impossible, culpabilité, créativité morbide et rédemption se disputent le haut d’un panier plein à craquer de grands thèmes, figures imposées d’un drame boursouflé comme on en n’avait pas vu depuis longtemps. Présenté hors compétition à la dernière Berlinale, le film tourne autour de Tomas (James Franco), jeune écrivain coutumier du syndrome de la page blanche avant qu’un accident de voiture le fasse mortellement percuter un petit garçon. Ses relations amoureuses en patissent, Tomas fait une tentative de suicide. Mais quelques années plus tard, il rencontre le succès grâce à un livre inspiré par la tragédie – c’est sans compter sur le passé qui n’en finit pas de ressurgir. Le tout noyé sous une musique omniprésente (jamais plus d’une minute sans score), composition symphonique efficace mais pompière d’Alexandre Desplat.

On a du mal à voir ce qui a pu séduire Wenders dans le scénario de Bjørn Olaf Johannessen, scénariste croisé il y a quelques années à Sundance et à qui le cinéaste avait demandé de lui envoyer son prochain texte. Tout y est ampoulé, affecté et sans la moindre nuance. Wim Wenders nous révèle dans le dossier de presse que dans l’exploitation de ce drame, en brodant autour du motif de la culpabilité, il illustre avant tout le rapport entre réalité et création – et les affres qui s’y affèrent. Si l’interrogation de l’appropriation de la tragédie d’autrui dans l’art est, de fait, passionnante, il aurait fallu la mettre au service d’un script bien mieux dessiné, plus solidement construit. Au lieu de quoi Wenders enfile les perles, alignant les scènes et les ellipses comme autant de passages obligés sans jamais témoigner ni de l’ambiguïté qui présidait dans Paris, Texas (1984), ni de l’extrême délicatesse dont il faisait preuve dans Les Ailes du désir (1987) ou, plus récemment, Land of Plenty (2004). 

 

Et la 3D ? Difficile, là encore, de ne pas être circonspect quant à son usage. Là où elle magnifiait la danse de Pina Bausch dans Pina (2011), elle semble ici participer plus d’un caprice de réalisateur, d’une volonté de faire beau et d’ajouter de la profondeur de champ en toute circonstance. Wim Wenders s’en amuse beaucoup, jouant des différentes valeurs de plans jusqu’à l’overdose. Pas une image fixe dans Everything Will Be Fine, mais un mouvement permanent – même léger – qui confine à l’ivresse : zooms avant et arrière perpétuels, quoique quasi imperceptibles, donnent au film une impression de flottement plus désagréable qu’autre chose. Il y a, évidemment, une composition très soignée, une attention véritable, aux objets notamment, qu’on ne peut pas nier. Au milieu de l’ennui poli que dégage le film, reste la joliesse d’une fenêtre ouverte, d’une brise qui fait gonfler les rideaux, d’un rayon de soleil dans lequel on voit danser la poussière.

Titre original : Every Thing Will Be Fine

Réalisateur :

Acteurs : , , , , ,

Année :

Genre :

Durée : 115 mn


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Journal intime

Journal intime

Adapté librement du roman de Vasco Pratolini, « Cronaca familiare » (chronique familiale), « Journal intime » est considéré à juste titre par la critique comme le chef d’œuvre superlatif de Zurlini. Par une purge émotionnelle, le cinéaste par excellence du sentiment rentré décante une relation fraternelle et en crève l’abcès mortifère.

Été violent

Été violent

« Eté violent » est le fruit d’une maturité filmique. Affublé d’une réputation de cinéaste difficilement malléable, Zurlini traverse des périodes tempétueuses où son travail n’est pas reconnu à sa juste valeur. Cet été
violent est le produit d’un hiatus de trois ans. Le film traite d’une année-charnière qui voit la chute du fascisme tandis que les bouleversements socio-politiques qui s’ensuivent dans la péninsule transalpine condensent une imagerie qui fait sa richesse.

Le Désert des tartares

Le Désert des tartares

Antithèse du drame épique dans son refus du spectaculaire, « Le désert des Tartares » apparaît comme une œuvre à combustion lente, chant du cygne de Valerio Zurlini dans son adaptation du roman éponyme de Dino Buzzati. Mélodrame de l’étiquette militaire, le film offre un écrin visuel grandiose à la lancinante déshumanisation qui s’y joue ; donnant corps à l’abstraction surréaliste de Buzzati.