Affaire de famille

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Assez vaine tentative de comédie policière futée « à la francaise », comprenant déconstruction narrative et tutti quanti. Mais n’est pas de Palma qui veut…

Reprendre la fameuse astuce du film Rashomon, d’Akira Kurosawa, consistant à faire reposer toute la dramaturgie d’une histoire sur la reprise d’une scène sous des points de vue différents, ne suffit pas, cela fut maintes fois prouvé, à atteindre la dimension quasi existentielle du modèle.
Dans le même genre, les réussites récentes notables sont plutôt américaines, elles datent d’il y a déjà dix ans, et ont pour signataires des cinéastes que l’on pourrait qualifier de particulièrement cinéphiles et méticuleux, pour ne pas dire obsessionnels : Brian de Palma pour Snake Eyes, vertigineux exercice de style fondant une enquête sur la fluctuation des champs de vision ; Quentin Tarantino, dont la scène centrale de "L’échange", dans Jackie Brown, brille par sa manière de compléter en toute souplesse un bloc subjectif par son hors-champ jusqu’ici deviné.

Affaire de famille, sous la forme d’une « grande combine » au pays de monsieur et madame tout-le-monde, se prend très vite les pieds dans la supposée « intelligence » de son dispositif. Divisant en vagues chapitres sa peu passionnante histoire de circulation d’argent, avec manipulations et soupçons au sein même de la famille, flirt dangereux avec l’ennemi, etc, Claus Drexel semble ne faire reposer son récit que sur le seul emboîtement des points de vues. A ceci près que chez ses collègues américains, l’emboîtement ouvrait sur une conscience affolante de l’unicité d’un lieu, de la proximité permanente avec un prédateur plus ou moins niché dans la profondeur de champ, l’amorce du plan…. Rien de tout cela ici, pas le moindre trouble. Images et sons correspondent « finalement », les sens auraient joué quelques tours par-ci par-là… et puis voilà.

Reste que les acteurs sont globalement sympathiques (mention spéciale à Dussolier, qui, chez Resnais, Pascal Thomas ou ailleurs, préserve ce détachement bienveillant assez unique), le film pas méchant, quelques répliques assez drôles par leur… drôlerie. Rien de grave.

Titre original : Affaire de famille

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Durée : 90 mn


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