Z

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Plus de 50 ans après, le trépidant pamphlet de Costa-Gavras reste malheureusement d’une inquiétante actualité.

À cause d’un assassinat

Avec George Semprun, Costa Gavras écrit le scénario de Z à partir du livre éponyme de Vassílis Vassilikós basé sur le dossier d’instruction de l’assassinat, en 1963, du député démocrate Grigróris Lambrákis. Pour son premier essais politique le tout jeune réalisateur affirme une clairvoyance et un engagement qui ne cessera de nourrir son œuvre, à l’instar du récent Adults in the Room. En 1969, l’homme qui, mu par une soif de liberté, s’est exilé en France depuis presque quinze ans s’insurge contre la dictature militaire qui phagocyte sa pays natal. Si l’action ne s’enracine pas officiellement en Grèce, quelques allusions bien marquées, dont la musique extra-diégétique, n’échapperont bien entendu à personne. Si Voltaire en son temps installe son Zadig dénonciateur dans un pays imaginaire pour éviter la censure, le Z de Costa-Gavras ne craint nullement les foudres d’un tel fléau mais vise lui aussi l’universel. Un cinéma sans frontières, un regard sans concession sur les ennemis de la démocratie, ces gouvernements qui sous couvert de protéger leurs peuples les tiennent par la peur; police, armée et justice œuvrant de concert au service d’un pouvoir politique sans vergogne. Intemporel, prophétique, le champ lexical ne manque pas de fatalistes nuances pour désigner l’acuité de tels propos. Gavras ne fait pas de la politique mais du cinéma , un adage bien plus efficace pour éveiller les consciences.

Un plaisir toujours intact

Le public vient au cinéma pour se divertir, aime souvent à rappeler Costa Gavras. Dans la pure lignée de cinéma américain de genre. L’oscar du meilleur film étranger obtenu  en 1970 va comme un gant à ce thriller-politique qui ne souffre d’aucun temps mort. Obligés de reconnaître le sincère engagement du citoyen Gavras, les détracteurs du réalisateur le confinent souvent au statut d’un simple metteur « en boîte », peu inspiré par l’art de la mise en scène. Un jugement des plus réducteurs. Dans Z, l’action, fil conducteur de la narration repose sur un montage dont la fluidité et la précision du timing traduisent l’inexorable engrenage, l’ impitoyable machinerie qui broie tout sur son passage. Les flashes- back, impérieuses explications au caractère cinématographique si souvent pesant, s’inscrivent ici dans le même tempo que l’action.

À plusieurs occasions, comme lors de la première apparition du Procureur Général (François Perrier), seul dans son grand bureau, le cadrage ne manque pas de souligner la petitesse de ces pleutres autoritaristes. L’outrance des manipulateurs pourrait nous conduire sur la scène d’une simple farce sans gravité, mais comme chez Molière, la noirceur de l’âme se révèle sans frein. Pierre Dux (le général de gendarmerie), illustre figure de La Comédie Française, mène avec une inquiétante malice tout son petit régiment de diaboliques. Face à eux, les pacifiques, Charles Denner, Yves Montand et l’innocent juge d’instruction que Jean-Louis Trintignant réfugie sous ses proéminentes lunettes, sont également savamment dirigés.

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Durée : 125 mn


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