The Sex List

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Le syndrome du post-it mental : argument d’une comédie estivale féminine et potache.

Boise, Idaho – 1993. Brandy Clark achève à peine son lycée qu’elle prépare déjà son entrée à l’université. En bonne première de la classe, c’est elle qui donne le discours de fin d’année face à une salle comble. Elle est rapidement chassée de scène d’un « Get off the stage, virgin! » (« Dégage de là, pucelle ! ») crié par une camarade délicate. Malgré un curriculum scolaire et extra-scolaire digne de son héroïne Hillary Clinton, Brandy est loin d’être une fille cool, encore moins l’étudiante préparée à l’éclate sexuelle promise à l’université. Elle se donne l’été pour y remédier.

Seul film du corpus écrit et réalisé par une femme, Maggie Carey, The To Do List ne cache pas ses ambitions de comédie potache. Le sexe y est envisagé comme un défi, évoquant un parangon féminin de SuperGrave (Greg Mottola, 2007). L’écurie comique n’est pourtant pas tout à fait la même, même si Aubrey Plaza (Brandy Clark) avait un petit rôle dans Funny People (Judd Apatow, 2008). Christopher Mintz-Plasse, ici dans un petit rôle, y incarnait le mythique McLovin (il joue également le maître des auditions dans The Hit Girls (Jason Moore, 2012).

On peut quand même compter sur quelques pointures de la télévision américaine, Bill Hader et Andy Samberg (Saturday Night Live – Lorne Michaels, 2005 – 2013), Aubrey Plaza donc, plus connue pour Parks and Recreation (Greg Daniels et Michael Schur, 2009-), Donald Glover de Community (Dan Harmon, 2009 – 2014), ainsi qu’un superbe clin d’œil avec la présence de deux acteurs du cast de Friday Night Lights (Peter Berg, 2006 – 2011).

Si c’est le film que nous évoquons dans ce Coin du cinéphile, la série créée par Peter Berg aura eu un impact plus grand dans les mémoires cinéphiles, restant la grande épopée télévisuelle de l’adolescence, dont la finesse d’approche n’excluait pas l’humour, mais sur une tonalité bien plus mélancolique. Le personnage de Tami Taylor, jouée par Connie Britton, figure maternelle décisive pour les nombreux ados perdus de la série, devenue culte par la suite, retrouve ici quelques flamboyances, dans un registre plus loufoque. L’actrice incarne toujours une maman idéale, cette-fois légèrement moins pudique sur les questions de sexualité. On retrouve également Scott Porter, à l’opposé de son personnage de gendre idéal dans Friday Night Lights, ici transformé en playboy blond répondant au doux nom de Rusty Waters.

L’inscription temporelle dans les nineties, outre la possibilité pour la cinéaste de jouer d’une direction artistique résolument colorée et pleine de gadgets – le générique de début est un régal – et d’une bande son tout aussi décalée, vient surtout situer les questionnements autour du sexe avant l’avènement d’Internet. Sans toutes ces nouvelles sources d’informations, Brandy doit se contenter de lire Penthouse et de demander conseil à son entourage, sa sœur aînée notamment.

Mais comme toujours, Brandy la jeune fille parfaite veut bien faire. Alors pour accomplir son éducation, elle élabore une liste d’actes sexuels, comme autant d’entraînements avant sa véritable première fois. Ainsi, dans sa tentative d’organiser et de rationaliser la seule chose qui la perturbe et lui fait parfois perdre son self-control, l’adolescente se comporte en scientifique en recherche. Bien loin de la jeune fille captive de ses sentiments ou éprise d’un seul garçon – elle expérimente avec pas moins de quatre garçons -, Brandy affirme son contrôle sur cet aspect-là de sa vie, au même titre que les autres.

Les autres personnages féminins sont à l’avenant, sans jamais trahir leurs visées clairement humoristiques. La sœur aînée, terriblement libérée, qui joue sans scrupules de ses atouts pour ne pas avoir à travailler (sic), tout comme leur mère, s’efforçant de ménager son époux, personnage old school effrayé par la moindre discussion autour du sexe. Elle lui avouera d’ailleurs, contrairement à ce qu’il a toujours pensé, qu’elle n’était plus vierge lors de leur nuit de noces et déjà bien plus expérimentée que lui.

Si la sexualité est clairement l’outil de la dimension potache du film, avec ribambelles de blagues en dessous de la ceinture et de scènes foutraques sur des ébats ratés, on constate aussi qu’il en est question assez librement. Le film fut d’ailleurs noté R – RestrictedLes mineurs de moins de 17 ans doivent être accompagnés d’un adulte ») par la commission de classification des films américains. Rarement on aura vu de teen movie populaire faire allusion à autant de descriptions équivoques, montrer des schémas d’organes sexuels, du sperme sur les doigts d’une fille et tant d’autres actes signifiés aussi peu pudiquement.

Est-ce que le film est pour autant vulgaire ? À aucun moment, car les intentions scénaristiques ne trahissent jamais le parcours d’un personnage adolescent indépendant et involontairement très attachant : sa psychorigidité et son carriérisme appelaient évidement à un assouplissement, mais qui n’aura pas lieu là où on l’attendait. Reste que le film ne se contente pas de dérouler son grand jeu de fesses, n’oubliant jamais ses personnages secondaires, notamment celui joué par Bill Hader (ici filmé par son épouse).

Par ailleurs, comme toute bonne comédie venue des États-Unis, The To Do List travaille ses dialogues à la perfection : rempli de punchlines parfaites (« Teenagers don’t have regrets. That’s for your 30″, « Beer should be a food group, am I right?« ), il s’en dégage également une intimité inattendue, comme si tant de grossièreté et de moments touche-pipi ne pouvaient altérer la quête idéaliste de son héroïne. Celle-ci, dont le modèle féminin est Hillary Clinton, s’affranchira des humiliations et des épreuves, vers une vision de « la chose » démystifiée et dédramatisée, où le sexe n’en sera que meilleur.

 

Titre original : The To Do List

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Durée : 104 mn


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