The Impossible

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Ewan McGregor et Naomi Watts dans la tourmente du tsunami de 2004 pour un film catastrophe plus intimiste que prévu.

Aucune raison, a priori, d’aller voir The Impossible. La bande annonce rassemble tout ce qu’il y a de pire : gros plans sur des visages barbouillés de larmes, retrouvailles en slow motion, lâcher de lanternes, U2 en fond sonore – belle démonstration de chantage à l’émotion, peinture racoleuse du destin de victimes qui méritaient mieux que ça. Finalement, The Impossible est loin d’être horrible – mieux, il ménage de vrais beaux instants. Et que, sur un terrain si miné, il ne soit pas horrible, c’est déjà énorme. Le thème, c’est bien sûr le tsunami du 26 décembre 2004 en Asie du Sud-Est, que personne n’avait vu venir et qui a fait plus de 200 000 morts. Sujet en or pour un film catastrophe, estampillé en plus du cachet « histoire vraie ». Juan Antonio Bayona est aux commandes ; il a réalisé L’Orphelinat, bonne surprise de 2008 qui, déjà, valait mieux que ce qu’on en attendait. Le cinéaste s’attache ici à l’histoire d’une famille de vacanciers espagnols, un couple et leurs trois enfants, séparés par le tsunami qui ravage leur hôtel en bord de mer. Tous ont survécu.

Cette histoire impossible-mais-vraie, Bayona la sait inattaquable. Et puisqu’il la sait inattaquable, il peut la raconter telle quelle, de survie improbable en retrouvailles inopinées – dans un hôpital de terrain surbondé ou parmi les décombres de l’hôtel. Ce qui surprend, c’est le temps qu’il se donne pour la dérouler, en même temps qu’il s’attache à des points de détail qui permettent de prendre la pleine mesure de ce qu’est vraiment le fait de vivre un tsunami. La première moitié du film l’illustre parfaitement : passée la séquence, impressionnante de technique, de la vague en elle-même, il colle au personnage de Naomi Watts et l’un de ses fils durant une vingtaine de minutes. De l’eau, on voit qu’il n’y a pas que la puissance, mais aussi tout ce qui se trouve désormais en-dessous : les branches d’arbre qui tranchent la chair, les voitures que les corps percutent, les cadavres qui s’empilent. Et quand l’eau se retire enfin, la marche dans des paysages désolés qu’on traverse sans avoir où aller. Dans la meilleure séquence du film, un sein dépasse du débardeur déchiqueté de Naomi Watts, sa jambe droite est ouverte sur la moitié de sa longueur. Son fils s’en émeut : elle le fait passer devant, rattache du mieux qu’elle peut la bretelle. Belle façon de dire que même face au pire, il reste la pudeur.
 
 

Le reste est plus balisé, mais jamais scandaleux. Les plans larges, à la grue, montrent l’étendue du désastre ; les plans rapprochés suivent les cinq personnages dans leur parcours, soucieux d’inscrire leur individualité dans une tragédie collective. Eux s’en tirent, pas des milliers d’autres : Bayona s’attarde sur les lits d’hôpitaux qui se vident, sur les noms qu’on cherche et qu’on ne trouve pas sur les listes de survivants, sur les coups de téléphone qui n’arrivent pas – The Impossible se veut hommage à toutes les victimes. On est encore loin de la puissance évocatrice d’Emmanuel Carrère dans son livre D’autres vies que la mienne (2009), mais le film a le mérite de ne pas en rajouter : Bayona s’en tient à son quintet, évacuant presque toute histoire parallèle qui tendrait à la dispersion. Le sort des autres émerge du regard de ses personnages, des enfants notamment – d’ailleurs assez extraordinaires. Pas de quoi s’extasier, mais le réalisme cru et l’excellente interprétation de Naomi Watts et Ewan McGregor en font un film recommandable, et le premier à donner une image crédible de l’enfer de 2004.

Titre original : The Impossible

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Durée : 107 mn


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