Persona non grata

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Qui embrasse trop mal étreint !

En parallèle d’une belle carrière d’acteur, Roschdy Zem est, depuis une bonne dizaine d’années, passé derrière la caméra avec un goût certain pour l’éclectisme. S’essayant aussi bien à la comédie avec Mauvaise foi, qu’au plaidoyer pour la justice avec Omar m’a tuer, ou au biopic avec Chocolat. Le pitch de Persona non grata nous conduit sur un terrain de jeu si bien balisé qu’il en est quasiment devenu un genre cinématographique à part entière ; quand l’avidité conduit au pire, l’étau se resserre inexorablement sur les pleutres ambitieux. En multipliant les pas de côté, notamment humoristiques, Roschdy Zem tente de sortir des sentiers battus. Avec le risque de s’éparpiller vainement.

 

 

Vices de construction

Le scénario est bâti sur un doux euphémisme ; dans la vie, et encore plus dans les affaires, on n’est jamais trahi que par les siens. Ici, tout commence par l’assassinat d’un vieux roublard de promoteur immobilier, commandité par les deux associés qu’il avait pris sous son aile depuis leur plus jeune âge. De là, vont se révéler, au sein des différents cercles (familial, amical et professionnel) toute une palette de comportements peu recommandables : corruption, manipulation adultères…. Quand on veut garder sa place ou sauver sa peau, il ne faut pas lésiner sur les frais. Soucieux de respecter le cahier des charges d’un tel projet, le maître d’œuvre Roschdy Zem empile les trahisons et les rebondissements dans un timing record. Tout est bouclé en simplement deux mi-temps de football, sans arrêts de jeux. Pas le temps de laisser les différents antagonismes se cristalliser. Un déséquilibre au sein du duo central vient également fragiliser l’édifice. Alors que Nicolas Duvauchelle campe avec solidité l’ultra-vulnérable José, Raphaël Personnaz manque réellement d’épaisseur pour incarner son alter-égo sans état d’âme (Maxime).

 

 

L’inconnu dans la maison

Le crime aurait été tout bénéfice pour José et Maxime sans la réapparition surprise de leur tueur à gages. Pas simplement désireux de récolter plus de fruits que prévus,  le bien nommé Moïse va, avec un malin plaisir, venir semer les graines de la discorde et guider jusqu’au gouffre tout ce petit monde d’arrivistes. Aussi inquiétant dans ses démonstrations de violence que dans ses numéros de charme, l’acteur Roschdy Zem s’en donne à cœur joie dans son rôle du parasite dynamiteur. Sur un schéma qui n’est pas sans rappeler, toutes proportions gardées, celui du dernier Bong Joon-Ho, la satire manque ici de mordant. L’humour n’est pas toujours très drôle et, surtout, on reste trop souvent en plan lorsqu’une situation s’engage sur de bons rails. Il y a quelques idées astucieuses, de louables intentions, comme celle de faire apparaître en arrière plan des quartiers populaires de l’agglomération montpelliéraine ; mais il manque de la folie, du liant pour que le projet de Roschdy Zem soit réellement abouti.

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Durée : 92 mn


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