Le film remake le déjà peu réussi Crime d’amour (2010) d’Alain Corneau (dernier film du réalisateur français), dont l’intrigue est reprise à la virgule près. Les ajouts de de Palma apporteront uniquement matière aux grilles de lecture des chantres de la politique des auteurs mais certainement pas à ceux venus voir un bon film. À l’époque des grands films précités, de Palma prenait tous les risques dans sa mise en scène, n’hésitait pas à friser le ridicule dans ses effets mais sa maîtrise, toujours au service du récit, le faisait toujours retomber sur ses pattes. Ici, de Palma ne sert que lui-même et l’ensemble tourne à vide. Tout est là – le questionnement sur le regard et la notion de point de vue, la manipulation et la schizophrénie – mais pourtant rien ne fonctionne. Les reproches, souvent faits à tort, à de Palma, sont ici pertinents : virtuosité vaine où plans-séquences, split screen et mouvements alambiqués sont totalement gratuits (on pense notamment à celui entre le meurtre et le ballet). L’esthétique est dans l’ensemble hideuse et ringarde, en plus de faire dans la lourdeur explicative – la photo se faisant bleu sombre et les intérieurs tamisés dès que les relations se tendent entre les deux rivales. Si Noomi Rapace n’a aucun mal à faire oublier la mauvaise Ludivine Sagnier de l’original, Rachel McAdams, trop immédiatement sournoise dans son jeu, ne dégage pas l’ambiguïté, entre froideur et vulnérabilité, de Kristin Scott Thomas.
Malgré un pitch intriguant, Crime d’amour n’était guère palpitant. Pour rehausser l’intrigue, de Palma n’a comme atout qu’une suite de gimmick vains, à l’image d’un final reproduisant ceux de Carrie (1976), Pulsions ou même Femme fatale. De Palma aurait-il déjà tout dit ? Pour le savoir, et afin que s’estompe ce sentiment de redite, il faudra – comme autrefois – qu’il daigne s’aventurer sur des terrains moins familiers.