Encore jeune mais déjà usé, Anders se donne à peu près vingt-quatre heures pour prendre une décision irréversible. La vie vaut-elle la peine d’être vécue lorsqu’on doit renoncer à ses idéaux ? Adolescents, on dresse la liste de tous nos rêves… vers la trentaine, on tient les comptes de ce qu’il en reste. Seul et droit dans la forteresse en ruine de son idéalisme, Anders est sommé de reprendre goût à la vie : entretien d’embauche, visite chez un vieux copain, rendez-vous avec sa sœur, soirée branchée… Seulement le planning se révèle moins alléchant que prévu : coucher avec son ex n’a d’ailleurs plus le même goût. On ne peut rien contre l’insatisfaction croissante d’Anders. La mélancolie cède vite à l’égoïsme, toutes parties confondues. Qu’il s’agisse de Thomas, le meilleur ami d’Anders, prisonnier d’une routine pépère, ou encore de sa sœur, qui s’inquiète tellement pour lui qu’elle refuse de le voir, Anders n’est pas aidé. On a toutefois du mal à avoir de l’empathie pour lui.
Une ravissante étudiante à la plaisante dentition ne suffira pas à lui redonner goût à la vie. Et pour cause. Le petit mannequin est aussi lisse et superficiel que la ville filmée par Trier, décidemment trop à distance de ses objets et mesuré dans ses effets. Le joli parallèle pourtant lancé au début entre Oslo et Anders promettait les plus beaux échos entre la chair et l’asphalte : « Je me demande ce qu’il est devenu. Ils ont rasé la Tour Philips. » Mais à l’image de son héros, le réalisateur ne prend finalement aucun risque, et surtout pas celui de choisir un point de vue pour son récit, d’où notre indifférence – inadmissible – vis-à-vis du choix ultime. Paradoxalement, cette neutralité mal assumée associée à l’esthétique excessivement bobo de l’environnement dépeint, nous mèneraient presque à comprendre les élans suicidaires d’Anders. Dommage, cependant, qu’il faille constater les insuffisances formelles d’un film élégamment lyophilisé pour intégrer enfin l’abattement de son protagoniste.