Bref, voilà un film de revenants dont on n’espérait pas grand-chose. A cette aune, MIB III, tout calibré qu’il soit, s’avère une bonne surprise. S’il ne rabat en aucun cas les cartes du divertissement grand public – personne ne lui en demandait tant – il se présente comme un produit soigné, jamais assommant, à la fois léger et pétillant. Contrepartie : ce cru savoureux peut parfois paraître un peu court en bouche.
Pour autant, le plaisir teinté de nostalgie que MIB III distille d’emblée est incontestable. Il tient autant à la musique caustique de Danny Elfman qu’à la réalisation de Sonnenfeld, qui s’inscrit dans le digne sillage des précédents volets : rythme sûr et presque sans temps mort ; effets spéciaux de qualité à défaut d’être renversants ; travellings millimétrés, vignettes symétriquement cadrées et jeux fluides sur les changements d’échelles. On a le droit de préférer cette mise en scène soignée et exhibitionniste, qui au moins assume son artificialité, aux découpages quelconques, souvent brouillons de bien des blockbusters récents – y compris les plus réussis, comme Avengers.
Pas révolutionnaire non plus, mais également roborative : l’interprétation des acteurs. Avant tout Will Smith, qui apporte une touche bienvenue d’humour, voire d’émotion « capraienne » à ce grand spectacle familial. A l’avenant, Tommy Lee Jones et le nouveau venu Josh Brolin convainquent par leur présence affectueuse et bourrue.
Toutefois, la vraie bonne surprise du film provient de son scénario. Dont on ne relèvera pas les incohérences, mais plutôt sa relative originalité, et les résonances qu’il entretient avec tout un pan de l’inconscient américain. L’idée du voyage temporel semble surtout prétexte à inscrire le film dans une certaine mythologie U.-S., en articulant le récit autour d’un évènement majeur de la seconde moitié du 20ème siècle : la conquête lunaire. Ce que MIB III partage explicitement avec un autre blockbuster récent, également produit par Steven Spielberg : Transformers 3 : la face cachée de la Lune. La réécriture de cette page d’histoire constituait la partie la moins déplaisante du film de Bay. Et a peut-être valeur de symptôme. Nostalgie d’un passé révolu ? Désir d’un retour aux sources d’un certain idéalisme américain, aventureux et naïf, confiant en ses valeurs humanistes – flambeau porté notamment par Capra puis Spielberg – en réaction au cinéma hollywoodien aussi désincarné que cynique de ces dernières années ? Peut-être. L’année dernière, mieux que le médiocre film de Bay, X-Men: Le Commencement jouait sur la même veine rétrospective. MIB III apparaît dès lors moins opportuniste, presque pas anachronique. Et même traversé d’échos politiques et sociaux très actuels, notamment à travers les blagues raciales de Will Smith (sur Obama, ou le racisme anti-noirs). Ce par quoi le film renoue avec les origines audacieusement métaphoriques de la trilogie, dont il s’affirme à la fois comme synthèse et comme point d’orgue.