L’oppression prend ici trois visages, ceux de trois amies : une mère veuve depuis ses 15 ans (Rani), une femme battue qui ne parvient pas à enfanter (Lajjo) et une danseuse itinérante prostituée (Bijli). Autant dire que le film n’est pas, a priori, une bonne tranche de rigolade. Pourtant, l’image est lumineuse et colorée, la musique entraînante, la caméra nerveuse, tous ces ingrédients culminant dans les scènes musicales, notamment celles où Bijli se produit sous son chapiteau en reprenant le fantasme de la femme fatale, vulgaire et tentatrice, sous les regards baveux des hommes avinés qui s’entassent à ses pieds. Des lueurs d’espoir ou de joie n’en percent pas moins dans les vies des trois femmes, lorsqu’elles s’échappent sur la moto du cirque pour une virée en plein désert, où elles peuvent hurler des insultes aux hommes, découvrir le plaisir, et oublier leur triste condition. Porté par de bonnes actrices, le film reste néanmoins assez pesant, car beaucoup trop démonstratif, toujours dans l’excès, qu’il s’agisse de l’évocation du désir (on se caresse les seins nus en gros plan entre amies, on fait l’amour dans une grotte sur un montage musical lascif), et surtout de la violence : à la cinquième scène où Lajjo se fait tabasser par son mari, on se dit que deux auraient bien suffi, d’autant qu’il faut y ajouter des scènes de viols à l’esthétisation douteuse, entre flous, ralentis et vus subjectives. La dénonciation des traditions patriarcales se fait donc à grands frais, dans une exubérance narrative et visuelle qui mélange conte et réalisme, pour un résultat emporté mais in fine assez anecdotique.
La Saison des femmes
Article écrit par Guillaume Schaeffer
Charge virulente contre le patriarcat dans l´Inde rurale, colorée mais sans nuances.