Un scénario inspiré
C’est avant tout cela qui peut expliquer sa réussite et la joie que le film prodigue, à savoir un très solide scénario sur lequel Mark Perez, à qui il est imputable, a d’ailleurs passé cinq ans. Axé autour d’une addiction aux jeux de société – des batailles navales au Pictionary en passant par les devinettes d’acteurs -, Game Night propose, parallèlement à un divertissement survolté sans temps mort, une réflexion assez pertinente sur la frontière entre réalité et jeu, esbroufe et sérieux – la frontière se faisant parfois poreuse… Les répliques et les gags fusent avec célérité dans ce film aux facettes multiples, puisqu’on y trouve également les thèmes de l’amitié comme de la rivalité entre frères, ainsi que la trajectoire d’un couple qui se forme au début du film avant de nourrir le projet de mettre au monde un enfant, ce qui compromettrait cependant la régularité voire l’existence de leurs soirées-jeux effrénées. Game Night puise ainsi à droite comme à gauche avant de finalement ne ressembler qu’à lui-même. Mâtiné de burlesque, d’action comme de romance et d’espionnage, il s’apparente à une promesse d’évasion euphorisante où les possibilités paraissent maximales et où tout – semble-t-il – peut arriver, grâce à l’imagination débridée de Perez à laquelle peu ou pas de brides semblent avoir été mises.
Pour porter ce script appliqué, a été convoqué un ensemble d’acteurs, habitués qui plutôt au cinéma, qui plutôt aux séries. Grâce à Perez qui n’a pas négligé même les caractères dits secondaires et n’écrit aucun personnage fonctionnel, ils bénéficient d’une appréciable prestation à laquelle ils rendent justice avec brio. À côté de Jason Bateman, cador du genre déjà présent dans Horrible Bosses, et la pétulante Rachel McAdams, déjà vue chez Brian de Palma, Terrence Malick ou Guy Ritchie mais habituée aussi du registre de la comédie romantique via Morning Glory de Roger Michell (2010), Midnight in Paris de Woody Allen (2012) ou encore le plaisant About Time de Richard Curtis (2013). Pour incarner les protagonistes soit disant "secondaires", on a envie de citer le déluré Billy Magnussen, qu’on pourra voir bientôt dans l’Aladdin de Ritchie en écervelé mi-inconscient mi-hardi, l’attrayante Kylie Bunbury, joueuse de baseball dans la série Pitch et qui ici est persuadée d’avoir couché avec Denzel Washington. Jesse Plemons enfin, second couteau récurrent ayant pu marquer les esprits entre autres dans The Master (2012) ou Breaking Bad (2008 – 2013), tire également tout particulièrement son épingle du jeu dans le rôle d’un policier veuf aussi triste qu’inquiétant et farfelu. Ce parterre de comédiens à l’unisson achève de rendre Game Night très agréable… Le film ne se refuse d’ailleurs que peu de plaisirs, même pas celui de mettre "Don’t stop me now" de Queen sur fond de coup de foudre intervenant après une question dans un bar portant sur le nom du Teletubby violet…