Faut que ça danse

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Dans la famille Bellinsky, il y a Salomon, le père, Geneviève la mère, et Sarah leur fille. Tous mènent leur vie comme ils le peuvent, l’un débordant de jeunesse alors que le monde voudrait l’enterrer bien vite, l’autre qui rêve de vivre son infantilisation avec son aide-ménager et Sarah qui tente de fonder une famille […]

Dans la famille Bellinsky, il y a Salomon, le père, Geneviève la mère, et Sarah leur fille. Tous mènent leur vie comme ils le peuvent, l’un débordant de jeunesse alors que le monde voudrait l’enterrer bien vite, l’autre qui rêve de vivre son infantilisation avec son aide-ménager et Sarah qui tente de fonder une famille avec François.

Faut que ça danse s’éloigne du précédent film de Noémie Lvovsky, Les sentiments, pour introduire l’humour juif, la loufoquerie, la gravité et des personnages pittoresques. Ce quatrième long-métrage est subtil, fantasque et tendre, à la fois personnel et universel.

Les thèmes ne sont pas révolutionnaires, ni même l’humour juif dont Woody Allen est le maître incontesté. Mais Noémie Lvovsky a le talent de détourner la trame générale sur les questions existentielles en une fable atypique. Ce sont les personnages attachants qui transpercent cette histoire par la précision et leur épaisseur. Dans la famille Bellinsky, la fille se retrouve enceinte alors qu’elle ne le pouvait pas, le père qui tente d’oublier son âge est refusé par la société et la mère reste enfantine. En réalité, toutes ces difficultés qui font le quotidien, cachent un mal bien plus profond et daté : la passé juif et le besoin de reconnaissance. C’est cette racine qui les unit. Mais au-delà de cet aspect fictif, le film trouve sa force dans des sentiments intimes puisés dans l’âme de la réalisatrice. On a l’impression que c’est la réalisatrice elle-même qui incarne la pièce angulaire. En tant que chef d’orchestre, elle tient les cordes de ses personnages avec exactitude, agençant chaque pas (de danse !) et chaque émotion, avec toujours autant de crédibilité. Ainsi, il y a autant de Noémie Lvovsky que de personnages. Le spectateur ressent la fragilité de parler d’un tel sujet et des thèmes corollaires : le besoin de transmission, l’acceptation d’un passé. Avec délicatesse et subtilité, elle insuffle sa vie dans des personnages et parvient à les rendre universels. Tout est proche et loin de nous à la fois.

L’oscillation entre les deux se fait naturellement. Comme pour ne pas trop heurter sa sensibilité et la nôtre, elle casse le rythme du drame par des moments fantasques. Des saynètes loufoques servent de catharsis et de tremplin imaginatifs aux peurs des protagonistes. Drôles et cocasses, ces scènes ponctuent le film sans fausse note car jamais grossières et exagérées. Tout est tourné en dérision pour mieux marquer les esprits et pour ne pas tomber dans le drame lacrymal. Le spectateur est toujours dans la mélancolie, dans le côté doux-amer de la vie mais jamais dans les pleurs. Les mots comptent aussi beaucoup pour passer du rire à l’amertume. Comme elle l’a prouvé lors de ses fructueuses collaborations scénaristiques, la réalisatrice scande son film de dialogues percutants et pétillants. Entourée d’un casting remarquable, le film s’avère profondément humain et rationnel. Chaque être humain ne peut que vivre sans une famille unie et sans amour, éléments indispensables pour traverser le quotidien.

Le credo de Jean Pierre Marielle, « faut que ce danse », est celui de la cinéaste et de n’importe qui. Il renvoie à la légèreté face à la gravité et aux difficultés de l’existence. En quelques sortes, le cinéma de Noémie Lvovsky est tout cela : extravagance, gaieté et mélancolie. Un cinéma apaisant, drôle et réaliste pour nous accompagner dans notre journée.

Titre original : Faut que ça danse !

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Durée : 100 mn


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