Conviction

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Tony Goldwyn récite sa leçon et signe un biopic judiciaire excessivement académique. Par trop convenu, l’ensemble se révèle même indigeste sur la longueur, en dépit d’une distribution de premier ordre.

Il faudrait toujours se méfier d’un film qui s’ouvre sur un plan de photos de famille sur un frigo et le cachet "inspiré d’une histoire vraie"… Des images maintes fois vues et une formule usée jusqu’à la corde par le cinéma hollywoodien, qui donne malheureusement souvent lieu à des films ratés. Pourtant, on se rémémore l’efficacité avec laquelle Erin Brockovich, seule contre tous dépeignait une société américaine où tout est possible, où la conviction et l’acharnement donnent raison à David contre Goliath. Mais si dans cette lutte opiniâtre qui voit une madame-tout-le-monde se confronter à l’implacable machine judiciaire, la prestation d’Hilary Swank n’a rien à envier à celle que livrait Julia Roberts en 2000, et le réalisateur Tony Goldwyn, habitué des séries télévisées, n’a pas le talent de Steven Soderbergh, lui.

Ancré dans une Amérique oubliée entre white trash et redneck (l’unique parti pris intéressant du film d’ailleurs), Conviction relate donc le combat de Betty Anne Waters (Hilary Swank) pour faire libérer son frère Kenny (Sam Rockwell), accusé du meurtre d’une femme qu’il jure ne pas avoir commis. Persuadée de son innocence depuis le début, cette mère ordinaire sans emploi ni diplôme va sacrifier presque vingt ans de sa vie à la recherche d’un indice ou d’une preuve, quitte à délaisser son couple et s’éloigner de ses enfants. Pour forcer ce destin contraire, elle reprend ses études, obtient son bac puis un diplôme universitaire, et choisit finalement d’assurer elle-même la défense de son frère, non sans avoir auparavant étudié le droit et réussi successivement l’examen du barreau dans deux états. En somme, une femme courage qui ferait presque passer Mère Teresa pour un monstre d’égoïsme.

Le début du film s’affranchit volontiers d’une certaine continuité temporelle au gré de nombreux flashbacks. À travers ce puzzle de scènes, le metteur en scène revient sur l’enfance difficile de cette fratrie permettant de mieux comprendre le lien indéfectible qui les a unis tout au long de ce combat épique. Rien ne nous est épargné entre le père absent, la mère indigne et le placement dans différentes familles d’accueil. Puis la narration reprend un caractère plus classique et linéaire pour coller aux rebondissements successifs de l’histoire, sans toutefois parvenir à créer le moindre effet de surprise ou à distiller une émotion forte. La faute aussi à un traitement visuel purement illustratif, à peine plus convaicant que celui d’un téléfilm des après-midis de M6, et au pathos appuyé auquel a recours Goldwyn dans le dernier tiers du film. Mais surtout aux ressorts grossiers qu’il s’évertue à employer pour prouver au spectateur, s’il en était besoin, à quel point cet homme est incapable d’avoir commis un tel crime. Au lieu de l’empathie évidente que devrait susciter le dévouement de cette femme, le réalisateur réussit l’exploit de rendre agaçant ce récit hors du commun, à tel point que l’on souhaiterait presque la culpabilité de Kenny. Ne serait-ce que pour donner un peu de piment à un film ankylosé par trop de poncifs !

La seule consolation vient de l’interprétation irréprochable des comédiens, qui, si elle ne parvient pas totalement à faire oublier l’académisme plan plan de Conviction, permet au moins de ne pas sombrer dans l’ennui le plus profond. Hilary Swank bien sûr, mais également Sam Rockwell (acteur injustement sous-estimé), qui éclaire le film de sa présence et de son indéniable charisme. Un casting parfaitement complété par des seconds rôles de choix parmi lesquels figurent Melissa Leo et Juliette Lewis notamment.

Titre original : Conviction

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Durée : 107 mn


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