Young Adult

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La scénariste et le réalisateur de « Juno » créent un bon personnage, mais pas un bon film.

Juno ne cassait pas trois pattes à un canard. Mais son ton et la qualité de l’écriture avait fait du réalisateur Jason Reitman et de la scénariste Diablo Cody des personnalités dont on avait envie de suivre l’évolution. L’envol dans les airs de Reitman (In the air) n’ a qu’à moitié convaincu et l’horreur anorexique de la seconde (Jennifer’s Body) pas mal effrayé, et pas dans le bon sens du terme. On était donc curieux de leur réunion dans ce Young Adult où la performance de Charlize Theron était annoncée comme mémorable.

Mavis est censée mettre le point final à une série de romans pour ado dont elle a repris la franchise mais dont le succès bat de l’aile. Entre balade du chien dans son sac de luxe, aventure d’un soir et effondrement comatique sur l’oreiller, la trentenaire n’a pas le temps de s’ennuyer. L’annonce de la paternité de son ex boyfriend de lycée la sort de sa léthargie. Et si c’était lui après tout le bon, l’unique… La voilà qui revient sur les traces de son passé, direction le ploucland de son enfance qu’elle avait fui bien à propos dans le but ultime de briser un ménage pour son confort personnel.

« Tout le monde ici est gros et taré. »

Young Adult s’organise donc autour des écarts irréconciliables entre Macy et son lointain passé qui n’a pas bougé d’un pouce depuis son départ. La Mavis des villes rencontre donc ses ex-congénères des champs, mais chien et fringues de luxe ne sont qu’un apanage, au fond elle est toujours un rat. Hautaine, désagréable avec tout le monde sauf le nouveau vieil élu de son corps, réal. et scénariste n’y vont pas avec le dos de la cuillère. Le film est un peu le pendant inversé du Mariage de mon meilleur ami (P.J. Hogan, 1997). Julia Roberts revenait sur les traces de son passé pour briser le mariage de son ex et se l’approprier. Mais le personnage avait quelque chose d’immédiatement sympathique à même d’emporter avec lui l’adhésion du spectateur. Aimable malgré elle donc, Julia Robert faisait de sa cause la nôtre et l’échec du mariage de son meilleur ami était alors souhaité comme le meilleur des happy ends possibles. Ici tout concourt à faire de Mavis une arriviste malveillante. Et si, au fil du film, quelques détails (des révélations, une amitié improbable entre la star et le looser du lycée…) humanisent le personnage monolithique, le film ne cherche absolument pas à le sauver.

 

Cette droite ligne tirée par le film et suivie in extremis jusqu’à la fin fait tout l’attrait et le sel de ce Young Adult par ailleurs plutôt mollasson. Charlize Theron/Mavis brille dans un environnement bien terne caractéristique de ce type de production américaine : une idée forte noyée dans un contexte et une vision bien consensuelle, un peu de poil à gratter mais quand même pas mal de sucre. Finalement la liberté initiale de l’entreprise (souvent une idée forte) se retrouve bridée par une frilosité générale. Seul le final, par l’entremise d’un personnage inattendu, se révèle à la hauteur des espérances soulevées par le film : une petite décharge électrique bénéfique pour un film qui en manquait sacrément jusqu’alors.
 

Titre original : Young Adult

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Durée : 93 mn


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