Après le coup d’éclat que fut en 2005 Les Amants réguliers, film qui confirmait chez Garrel une pleine santé, par son aptitude à reconstituer avec fougue les affrontements de mai 68, puis à tenir la distance d’une chronique post-adolescente de près de trois heures (marquant par ailleurs le début de sa collaboration « adulte » avec son propre fils), le mésestimé La Frontière de l’aube (2008) pouvait déjà, par sa forme brève, le caractère très littéral de ses scènes et dialogues, laisser craindre pour la suite une progressive perte de substance. Le film était très beau, très « garrelien » dans son art de suivre toutes les étapes d’une dépendance amoureuse poussant une jeunesse éclatante à sa chute, mais déjà, pouvait ça et là interpeller quelque schématisme dans la structure du scénario, une routine dans le dessin du désenchantement n’empêchant heureusement pas d’admirer les compositions de son trio vedette (Garrel fils, donc, mais aussi les nouvelles muses Laura Smet et Clémentine Poidatz).
Freddie en surchauffe
Que sauver ou retenir alors de cet Été brûlant, sinon l’embarrassante platitude de dialogues que la seule affiliation à l’Œuvre ne pourrait raisonnablement justifier. C’est bien simple : trouver du génie dans les répliques que s’échange le couple Frédéric-Angèle (Garrel-Bellucci) lors de ses scènes de ménage équivaudrait logiquement à cautionner les mêmes carences chez d’autres. Rien de cette vague histoire de jalousie d’un jeune peintre voyant peu à peu sa femme (actrice…) lui échapper n’incite jamais à entendre davantage que ce qui est dit. Tout s’énonce trop bien, le début de soupçon de l’un au vu de l’excès de légèreté de l’autre, le danger pour le couple d’amis séjournant chez eux de subir leur funeste influence, la fatalité qui rôde (celle parcourant, il est vrai, l’entièreté de l’Œuvre, mais qui, articulée à un scénario aussi cousu de fil blanc, finit par perdre tout potentiel tragique)…
Le désamour dont ce Garrel fit l’objet lors de sa présentation à la dernière Mostra de Venise – qui comme on sait couronna déjà deux fois le cinéaste d’un lion d’argent, là où Cannes accueillait pour la première fois l’un de ses films en compétition en 2008 – conforterait presque alors ce sentiment de rendez-vous manqué. Tout permettait sur le papier d’envisager un nouveau souffle, une table rase (emploi forcément intriguant d’une actrice aussi « populaire » que Monica Bellucci, titre annonciateur d’une aventure peut-être plus hot que prévu, retour donc à la couleur…). Rien, face à l’écran, ne donne finalement envie de chercher plus de profondeur ou de complexité qu’il n’y paraît. Après le consternant Impardonnables d’André Téchiné, navet d’auteur de l’été, Un été brûlant est donc en lice pour le titre de navet d’auteur de l’automne. Méchanceté ? Presque… si ces honneurs n’étaient à la hauteur de nos déceptions.
Angie l’allumeuse